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법과 의학 사이: 이탈리아 법의학의 기원 | 마릴린 니쿠드 - Academia.edu
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법과 의학 사이: 이탈리아 법의학의 기원
Histoire, médecine et santé 18 | hiver 2020 Historiciser l’expertise L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs Forensic expertise in Antiquity: Greek papyrus testimonies La pericia médico-forense en la antigüedad: el testimonio de los papiros griegos Antonio Ricciardetto Édition électronique URL : https://journals.openedition.org/hms/3020 DOI : 10.4000/hms.3020 ISSN : 2557-2113 Éditeur Presses universitaires du Midi Édition imprimée Date de publication : 11 novembre 2021 Pagination : 27-43 ISBN : 978-2-8107-0760-7 ISSN : 2263-8911 Ce document vous est offert par Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Référence électronique Antonio Ricciardetto, « L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs », Histoire, médecine et santé [En ligne], 18 | hiver 2020, mis en ligne le 11 novembre 2021, consulté le 17 décembre 2021. URL : http://journals.openedition.org/hms/3020 ; DOI : https://doi.org/10.4000/hms. 3020 Histoire, médecine et santé est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International. Antonio Ricciardetto, « L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs », Histoire, médecine et santé, 18, hiver 2020, p. 27-43. L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs Antonio Ricciardetto Università del Salento (Lecce) / Université de Liège, CEDOPAL Parmi la masse des papyrus grecs retrouvés dans les sables d’Égypte, 31 documents d’époque romaine et du début de la période byzantine contiennent le rapport d’une inspection conduite par un ou plusieurs experts, sur le corps d’hommes, de femmes et d’enfants de toutes conditions sociales, en majorité encore en vie, victimes d’une agression, d’une bagarre, d’un accident ou d’une maladie. Ces rapports s’insèrent dans une procédure administrative qui comprend quatre types de documents : la pétition, l’ordre, le rapport médical, et, en cas de procès, le compte rendu d’audience. L’objectif de cette contribution est de présenter cette procédure, qui constitue incontestablement l’une des premières attestations d’une démarche médico-légale, en illustrant chaque étape au moyen d’un exemple commenté et en accordant une attention particulière à l’expert qui conduit l’inspection, ainsi qu’à son expertise, à savoir le rapport médical. Mots-clés : papyrus grecs, expertise médico-légale, droit, Égypte romaine et byzantine, médecin public Among the bulk of Greek papyri that was retrieved from Egyptian sands, 31 documents dating back to Roman times and to the early Byzantine period contain the reports of inspections conducted by one or several experts on the bodies of men, women and children of all social conditions, who were still living as regards the majority of them and had fallen victim to either attacks, fights, accidents or diseases. Those reports are part and parcel of administrative proceedings which, such as they could be retraced, included four kinds of documents: the petition, the order, the medical report and, when there was a lawsuit, the reports of proceedings. The aim of this paper is to present these proceedings, which definitely constitute the earliest testimonies of a forensic approach, by illustrating each step with a commented example and by paying special attention to the experts conducting the inspections as well as to their medical reports. Keywords: Greek papyri, forensic expertise, law, Roman and Byzantine Egypt, public doctor 28 HMS 18 - 2020 | Historiciser l’expertise Offrant la possibilité d’établir un contact direct avec les habitants du Pays du Nil, les papyrus apportent une contribution inégalée à la connaissance de la civilisation antique, spécialement dans l’Égypte gréco-romaine et byzantine, à savoir le Pays du Nil pendant le millénaire qui va de la conquête d’Alexandre le Grand, en 332 avant notre ère, à l’arrivée des Arabes en 641/642*, période durant laquelle le grec était la langue véhiculaire du pays1 . La médecine n’échappe pas à cette règle, puisque, parmi les centaines de milliers de papyrus tirés des sables d’Égypte, où le climat chaud et sec a permis leur conservation, plus de cinq cents documents majoritairement écrits en grec ont un contenu médical2 . Parmi ceux-ci, 31 papyrus d’époque romaine et du début de la période byzantine (i er - ive siècles apr. J.-C.) contiennent le rapport (en grec, prosphônêsis) d’une inspection conduite par un ou plusieurs experts, sur le corps d’hommes, de femmes et d’enfants de toutes conditions sociales, en majorité encore en vie, victimes d’une agression, d’une bagarre, d’un accident ou d’une maladie. Ces rapports s’insèrent dans une procédure administrative qui, telle qu’elle a pu être reconstituée, comprend quatre types de documents : la pétition, l’ordre, le rapport médical, et, en cas de procès, le compte rendu d’audience3 . * Sauf indication contraire, toutes les dates mentionnées ici s’entendent « après J.-C. ». Les abréviations employées dans cette contribution pour désigner les éditions papyrologiques sont celles de la Checklist of Greek, Latin, Demotic and Coptic Papyri, Ostraca and Tablets (http://papyri.info/docs/ checklist). La présente contribution correspond à la version, réduite pour l’adapter aux recommandations éditoriales, de la communication que j’avais prononcée à Lyon le 14 janvier 2019 dans le cadre du colloque « Historiciser l’expertise. L’autorité de l’expert en médecine dans les sociétés antiques et médiévales ». 1 | Ce millénaire se subdivise en trois grandes périodes : la période ptolémaïque, qui va du début du règne de Ptolémée Ier Sôter à la conquête romaine (305-30 av. J.-C.) ; la période romaine, qui se termine au moment des réformes administratives de Dioclétien, en 284 apr. J.-C., date à laquelle il est de tradition, en papyrologie, de faire commencer la période byzantine. Celle-ci s’achève par la conquête arabo-musulmane de 641/642. 2 | La papyrologie s’est organisée en deux branches correspondant aux deux catégories fondamentales des sources sur lesquelles elle travaille, d’une part, les papyrus documentaires, c’est-à-dire les témoignages de la vie publique et privée (qui nous intéressent plus particulièrement ici), et, d’autre part, les papyrus littéraires (plus de 300 papyrus connus et édités à ce jour), à savoir, surtout, les restes de livres de médecine. Pour un aperçu général sur l’apport des papyrus documentaires à la médecine dans l’Égypte romaine, voir Marie-Hélène Marganne, « La médecine dans l’Égypte romaine : les sources et les méthodes », dans Aufstieg und Niedergang der Römischen Welt, II, 37, 3, Berlin/New York, De Gruyter, 1996, p. 2725-2733. 3 | Cette procédure a été étudiée de manière approfondie, surtout depuis les années 2000 ; voir Antonio Ricciardetto, La médecine et le droit. La procédure médico-légale dans l’Égypte romaine et byzantine d’après la documentation papyrologique grecque, à paraître, Presses universitaires de Liège (Papyrologica Leodiensia), qui constitue la version remaniée du chapitre II de ma thèse doctorale Recherches sur la typologie des papyrus documentaires grecs en rapport avec la profession médicale (iiie s. av. J.-C.-viie s. apr. J.-C.) : contrats, pétitions, rapports médicaux et lettres (Université de Liège, 2015). Parmi les études les plus récentes sur les rapports médicaux, signalons aussi Fritz Mitthof, « Forensische Medizin im römischen Ägypten », dans Harald Froschauer et Cornelia Römer, Zwischen Magie 29 Antonio Ricciardetto | L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs La pétition est adressée à une autorité qui, à l’époque romaine, est le stratège, à savoir le gouverneur du nome (une division administrative de l’Égypte), chargé notamment de la supervision des services de police4 . La victime, ou un de ses proches – un parent, l’employeur ou, dans le cas d’esclaves, le propriétaire –, y expose sa plainte ou sa requête, et peut demander l’intervention d’un expert pour examiner le corps. S’il donne suite à la requête, le stratège charge alors un assistant (hupêretês, à ne pas confondre avec l’assistant du médecin, qui n’apparaît pas dans cette procédure) de trouver cet expert et de l’accompagner durant l’inspection médicale : c’est ce qu’on appelle l’ordre. Un rapport médical, écrit par l’expert, parfois accompagné de l’assistant, en consigne les résultats. Enfin, en cas de procès, le rapport peut être utilisé comme élément de preuve ; il est alors mentionné dans les comptes rendus d’audience. Fournissant un exemple antique de consultation commandée à une personnalité qui a un statut reconnu, en vue d’aider, ensuite, à la prise d’une décision, en contexte judiciaire, ces documents offrent un éclairage singulier sur une situation d’expertise, dans le domaine de la médecine, qui est au cœur de ce numéro thématique d’Histoire, médecine et santé. La présente contribution a pour objectif de présenter les quatre types de documents qui composent cette procédure médico-légale5 , en illustrant chacun d’eux au moyen d’un exemple commenté et en accordant une attention particulière aux circonstances qui amènent à y recourir, à celui qui conduit l’inspection, ainsi qu’à son expertise, sous la forme d’un rapport. La plupart des documents qui und Wissenschaft. Ärzte und Heilkunst in den Papyri aus Ägypten, Vienne, Phoibos 2007, p. 55-63 ; Id., « Forensische Medizin in römischen und spätantiken Ägypten », dans Edward M. Harris et Gerhard Thür (éd.), Symposion 2007. Vorträge zur griechischen und hellenistischen Rechtsgeschichte (Durham, 2.-6. September 2007). Papers on Greek and Hellenistic Legal History (Durham, September 2-6 2007), Vienne, Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften 2008, p. 301-318, ainsi que la « Réponse » de B. Legras, dans le même volume, p. 319-324 ; Antonio Ricciardetto, « “Inspecter un corps mort” : contribution des rapports médicaux sur papyrus (i er -ive siècles de notre ère) à l’histoire de la pratique médico-légale antique », dans Philippe Charlier et Danielle Gourevitch (éd.), Actes du 4e Colloque international de Pathographie. Saint Jean de Cole, Mai 2011, Paris, De Boccard, 2013, p. 101-115, et Id., « La réponse du médecin : les rapports d’inspection médicale écrits en grec sur papyrus (i er -ive siècles) », dans Michiel Meeusen (éd.), Ancient Greek Medicine in Questions and Answers. Diagnostics, Didactics, Dialectics, Leyde/Boston, Brill, 2020, p. 133-153. 4 | En revanche, au début de la période byzantine, on a affaire à d’autres autorités : au logistês, en charge de l’administration générale de la cité ; à l’ekdikos, un auxiliaire judiciaire du gouverneur ; aux riparii, les chefs de police de la ville ou du nome, ainsi qu’aux nyctostratèges, chargés de la surveillance policière de la ville. 5 | Tout en étant bien conscient de son caractère anachronique, j’ai pris le parti d’employer l’adjectif « médico-légal », car les documents examinés dans la présente contribution attestent une application de la médecine à des questions de droit. C’est en effet à P. Zacchias (1584-1659), médecin du tribunal pontifical de la Rote, que l’on doit la première attestation de l’adjectif « médico-légal », en latin (medico-legalis). Cependant, en français, l’expression « médecine légale » apparaîtra bien plus tard, dans la seconde moitié du xviiie siècle (sa première attestation date de 1767) : c’est un néologisme contemporain des Lumières. 30 HMS 18 - 2020 | Historiciser l’expertise composent la procédure et qui seront examinés ici proviennent d’Oxyrhynque (l’actuelle El-Bahnasa), la métropole du nome oxyrhynchite, à environ 160 km au sud du Caire. Les fouilles qui y ont été entreprises par les Britanniques Bernard P. Grenfell et Arthur S. Hunt, entre 1895 et 1907, puis, par les Italiens, entre 1910 et 1914 et de 1927 aux années 1930, ont permis de mettre au jour des milliers de papyrus, édités en particulier dans les collections des Oxyrhynchus Papyri (P.Oxy.) et des Papiri della Società Italiana (PSI) ; de nombreux papyrus demeurent inédits6 . Quelques documents ont aussi été retrouvés dans deux autres métropoles, Hermopolis et Héracléopolis, ainsi que dans le nome arsinoïte. Le nombre restreint de documents relatifs à cette procédure provenant de cette région pourtant riche en découvertes papyrologiques, s’explique par le fait que celles-ci n’ont pas été faites dans la métropole du nome, où étaient conservées les archives, mais dans des villages7 . Si, à ce jour, aucun rapport médical grec n’est attesté hors d’Égypte, c’est en raison des conditions climatiques. De fait, puisqu’ils étaient écrits sur un support végétal, le papyrus, qui souffre de l’humidité, ils n’ont pu être conservés que là où il fait à la fois chaud et sec, comme dans les sables égyptiens. La pétition et l’ordre On compte à ce jour 13 pétitions dans lesquelles un individu s’adresse à une autorité, expose sa plainte et demande l’intervention d’un expert pour examiner son propre corps ou celui d’un de ses proches. Elles sont datées entre le 11 février 167 et le vie siècle, et la moitié d’entre elles est antérieure au début de la période byzantine (284)8 . À ce dossier, il faut joindre deux documents incertains9 , un papyrus inédit10, ainsi qu’une demande d’« inspection du ventre » (inspectio ventris), par une femme enceinte11 . Quant à l’ordre, qui suit la pétition, il peut être de deux types : direct, quand il a été noté sur un coupon contenant aussi une copie de la pétition (ce premier cas 6 | Sur Oxyrhynque, voir la bibliographie réunie dans Antonio Ricciardetto et Danielle Gourevitch, Théon, l’enfant grec d’Oxyrhynque. La vie quotidienne en Égypte au iiie siècle, Liège, Presses universitaires de Liège 2020, p. 87-88. 7 | Jusqu’ici, aucun rapport médical n’a été découvert au sud d’Hermopolis. 8 | Ce sont, par ordre chronologique, P.Harr. II 192 (prov. inconnue, 11.2.167), P.Oxy. XXXI 2563 (Oxyrhynque [= Ox.], c. 170), C.Pap.Gr. II, app. 1 (Ox., février-mai 177), P.Oxy. III 475 (Ox., 3.11.182) ; PSI inv. 4153 (Ox., 215/216), P.Flor. I 59 (prov. inconnue, 225, 241 ou 279), P.Oxy. LVIII 3926 (Ox., 9.2.246), P.Oxy. XII 1556 (nome oxyrhynchite, 2.1.247), P.Oxy. LXI 4122 (Ox., 22.6.305), P.Oxy. LI 3620 (Ox., 2.2.326), P.Gron.Amst. 1 (Ox., 14.3.454), P.Bon. 22 = SB XVIII 13127 (Ox., v e /vie s.), P.Oxy. XVI 1885 (Ox., 29.11.509). 9 | P.Oxy. XX 2268 (Oxyrhynque, milieu du vie s. ?) et P.Princ. II 29 (Philadelphie [nome arsinoïte], septembre 258). 10 | P.Harr. I 133 descr. (Oxyrhynque ?, 366). 11 | P.Gen. II 103 (nome arsinoïte, août/septembre 147). 31 Antonio Ricciardetto | L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs n’est attesté que par deux papyrus : P.Oxy. III 475 et P.Oxy. LVIII 3926), et indirect (cas beaucoup mieux attesté), lorsqu’on ne dispose que d’une allusion à celui-ci dans le rapport médical, dans la section « motifs de l’expertise », où l’auteur de l’examen rappelle toujours qu’il a été chargé ou mandaté, par l’autorité, de réaliser une inspection. Relatif à une mort accidentelle, le P.Oxy. III 475 (Oxyrhynque, 3 novembre 182) est l’un des deux exemples de coupon contenant l’ordre d’un stratège à un de ses assistants, et la copie de la pétition préalablement envoyée au stratège. Un soir de fête à Sénepta, un village du nome oxyrhynchite, Épaphroditos, un esclave âgé de huit ans, décède après être tombé de l’étage de la maison de son propriétaire12. Le lendemain, par une pétition, Léonidês (un parent du propriétaire) demande au stratège d’envoyer un de ses assistants à Sénepta, afin que le jeune esclave obtienne l’ensevelissement et la sépulture qui conviennent. Donnant suite à la requête, le stratège commissionne aussitôt un assistant de trouver un médecin public, d’examiner le cadavre, et, après avoir autorisé l’inhumation, d’établir avec lui un rapport écrit ; à cet ordre, il joint une copie de la pétition, pour le tenir au courant des faits. On remarquera la place essentielle qu’occupe l’assistant, si bien qu’on l’a parfois considéré comme le protagoniste de la procédure, supervisant le médecin. Aujourd’hui, on tend plutôt à attribuer des rôles complémentaires à ces deux professions : si le médecin, – l’expert –, constate le décès et en certifie officiellement la cause, l’assistant se charge pour sa part des démarches légales et administratives13. Notez en outre la rapidité d’exécution : tandis que le jeune Épaphroditos meurt le soir de la fête, la pétition parvient dès 12 | Épaphroditos s’était penché pour regarder des joueuses de crotales (ou castagnettes). Sur ces joueuses, voir Jean A. Straus, « Κροταλίστρια, κροταλιστρίς = joueuse de crotales, mais… », dans Paola Davoli et Natascia Pellé (éd.), Πολυμάθεια. Studi classici offerti a Mario Capasso, Lecce, Pensa Multimedia, 2018, p. 413-418. 13 | Ernst Boswinkel, « La médecine et les médecins dans les papyrus grecs », Eos, 48.1, 1956, p. 182- 184 : « Ceci, à mon avis, démontre assez clairement que c’est le hypêretês qui a été le principal personnage en cette procédure officielle, et que le médecin n’a représenté que l’expert désigné pour un but spécial […]. Je crois que c’est le hypêretês qui au nom des autorités dirige une enquête, c’est lui qui constate les faits et qui à cela est renseigné par l’homme professionnel ; c’est le hypêretês qui au besoin prendra des mesures et qui rapportera le cas à son chef (…) » (p. 183). Voir l’avis, plus nuancé, de Darell W. Amundsen et Gary B. Ferngren, « The Forensic Role of Physicians in Ptolemaic and Roman Egypt », BHM, 52, 1978, p. 352 : The two undoubtely had distinctly different functions […]. While the physician was responsible for verifying the extent of injuries or the cause of death, the hyperetes, as the representative of the official who would decide on legal implications, acted in an advisory capacity to his superior regarding potential court action. His presence at the medical examination was accordingly a desirable step in the total investigatory procedure leading up to possible legal action. Il est vrai que l’assistant pouvait, à l’occasion, conduire seul l’expertise : voir le P.Mert. ΙΙ 89 (nome Arsinoïte, 14 janvier 300), rapport d’un assistant au stratège, à la suite de l’agression d’un gardien des champs (pediophulax). Pour un autre cas de requête, où le pétitionnaire demande explicitement l’intervention d’un assistant (dans un contexte non médical), voir le P.Würzb. 8 (Antinoopolis, 30 décembre 158). 32 HMS 18 - 2020 | Historiciser l’expertise le lendemain au stratège, qui la transmet aussitôt à son assistant ; l’inspection a probablement eu lieu le même jour. Sous un climat chaud tel que l’est celui de l’Égypte, il était impératif d’examiner le corps mort au plus vite, avant que la putréfaction soit manifeste, et rende toute inspection vaine. Quels étaient les motifs d’une telle procédure ? Comme l’écrivait le regretté Jean A. Straus, s’il est bien connu que « dans l’antiquité, l’esclave est considéré comme une chose », le P.Oxy. III 475 « laisse toutefois entendre qu’il existe des limites à l’arbitraire » de son propriétaire14. La démarche attestée ici se justifierait alors par « une double nécessité » : 1. le respect des « obligations concernant le contrôle de la propriété et de l’aliénation des esclaves. On ne peut enterrer Épaphroditos sans autorisation pour éviter une fraude quelconque à l’égard du fisc » : il fallait donc garder trace de la mort de l’enfant dans les registres officiels ; 2. « afin de voir s’il n’y avait pas homicide volontaire ». Jean A. Straus suggère d’y voir l’application d’une constitution de l’empereur Antonin le Pieux (138-161), qui restreint « la potestas du maître », et prévoit « des sanctions contre celui qui tue son esclave sans raison ». Toutefois, les travaux les plus récents sur la question doutent des effets réels d’une telle législation15 . Le rapport médical Une fois la victime examinée, un rapport médical, écrit par l’expert, consigne les résultats de l’inspection. Les 31 rapports connus à ce jour sont datés de c. 89/94 à 393, et plus de la moitié d’entre eux, 18 au total, remonte au ive siècle16. Même si l’on n’a pas conservé de rapport postérieur à 393, il dut y en avoir bien après cette date, puisqu’on connaît des pétitions avec demande d’inspection médicale jusqu’au vie siècle. 14 | Jean A. Straus, « L’esclavage dans l’Égypte romaine », ANRW, II 10.1, 1988, p. 877. 15 | Heinz Heinen, « Amtsärztliche Untersuchung eines toten Sklaven. Überlegungen zu P.Oxy. III 475 », dans Arnaldo Marcone (éd.), Medicina e società nel mondo antico. Atti del Convegno di Udine (4–5 ottobre 2005), Florence, Le Monnier, 2006, p. 194-202. 16 | P.Oxy. LXXX 5254 (Ox., c. 89/94), P.Oslo III 95 (Ox., avril 96), PSI inv. 3241 (Ox., 13.7.96), PSI inv. 3242 (Ox., dernière décennie du i er s.), P.Oxy. LXXX 5255 (Ox., c. 118/121 ou c. 166/168), BGU II 647 (Karanis, 22.8.130), P.Oxy. III 476 (Ox., 159/161), P.Oxy. I 51 (Ox., 31.8.173), PSI V 455 (Ox., 8.8.178), P.Oxy. LXXX 5256 (Ox., 25.9.190), P.Oslo III 96 (Ox., juillet/août 252), P.Oxy. XLV 3245 (Ox., 297), P.Mert. II 89 (nome arsinoïte, 14.1.300), P.Oxy. LIV 3729 (Ox., 4.5.307), BGU III 928 (Héracléopolis, 307 ou 311), P.Oxy. LXXX 5257 (Ox., 312), P.Oxy. LXIV 4441 col. I et II (Ox., janvier/février 316), P.Oxy. VI 896 col. II (Ox., 1.4.316), CPR XVIIA 23 (Hermopolis, 322), P.Oxy. I 52 (Ox., 25.7/23.8.325), P.Oxy. LXIV 3195 (Ox., 13 ?-14.6.331), P.Oxy. LXVI 4528 (Ox., 6.5.336), P.Athen. 34 (Héracléopolis ?, 347), P.Louvre II 116 = SB XX 14638 et son double P.Cair.Preis. 7 = SB XX 14639 (Hermopolis, c. 330/340), P.Oxy. LXIII 4370 (Ox., 7.11.354), P.Oxy. LXVI 4529 (Ox., 22.6.376), P.Lips. I 42 et son double P.Lips. inv. 7 (Hermopolis, 27.3/25.4.391), P.Rein. II 92 (Ox., 25.3/23.4.393). 33 Antonio Ricciardetto | L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs Les rapports sont écrits au recto d’un coupon de papyrus, le plus souvent par une seule main (qui est généralement soignée et ne correspond pas à celle de l’expert), sauf pour les souscriptions. Ils occupent une colonne de texte d’environ 25 à 30 lignes. Ils faisaient l’objet d’au moins une copie (antigraphon), ce qui a permis, à deux reprises, d’identifier, tantôt le rapport lui-même, tantôt sa copie17 . Ainsi, dans un rapport provenant de Karanis (au nord du nome arsinoïte) et daté du 22 août 130 (BGU II 647), une note dans la marge supérieure signale qu’il s’agit d’une copie ; quant à l’original, à ce jour, il n’a pas été retrouvé. Le patient (ou un de ses proches) devait conserver une copie du rapport, tandis que l’original destiné à l’autorité mandante était archivé, selon la manière suivante, fréquemment utilisée dans l’administration romaine : un numéro était noté dans la marge supérieure, puis les coupons de papyrus contenant les expertises (et d’autres documents datés de la même année ou concernant une même autorité) étaient collés ensemble, par ordre croissant des numéros, de manière à former un rouleau, dénommé tomos sugkollêsimos. On suppose que les coupons de papyrus étaient classés par ordre chronologique, mais les quelques fragments de tomoi conservés à ce jour ne permettent pas d’en avoir la certitude. L’examen de la structure des rapports permet de retracer le déroulement d’une inspection médicale. Ceux-ci suivent un schéma fixe, qui s’applique à tout type de rapport, que celui-ci émane de médecins, de charpentiers, ou encore de maçons. On peut le diviser en dix points principaux : (1) informations initiales, (2) praescript, qui fournit des informations sur l’autorité destinataire du rapport, (3) nom de l’expéditeur, (4) motif de l’expertise, (5) introduction du rapport, (6) rapport, (7) éléments secondaires du rapport, (8) conclusion, (9) datation finale, et (10) souscription du ou des médecins, c’est-à-dire leur signature. Malgré quelques changements, notamment dans les types de magistrats auxquels sont adressés ces documents, leur structure demeurera à peu près identique du i er au ive siècle. Ce sont surtout les points 4 à 6 qui retiendront mon attention. Dans la partie « motif de l’expertise » (point 4), l’expert déclare avoir été chargé, par l’autorité, par le biais d’un assistant de ce dernier, et à la suite d’une pétition qui a été remise à cette autorité, de se rendre sur le lieu où se trouve la personne à examiner, de l’examiner et de faire un rapport écrit sur sa condition (diathesis). Quelquefois, ce point contient aussi des informations sur le patient et sur son statut social ; on trouve des personnes libres et des esclaves, des hommes, des femmes et des enfants. La partie « motif de l’expertise » peut aussi contenir l’indication de la date à laquelle l’autorité a reçu la pétition. Cette dernière précision est particulièrement importante puisque, lorsque le rapport est lui-même daté 17 | Voir les P.Cair.Preis. 7 et P.Louvre II 116, ainsi que les P.Lips. I 42 et inv. 7. Dans les deux cas, le rapport provient d’Hermopolis ; le mot « copie » (antigraphon) n’est pas précisé dans ces papyrus. 34 HMS 18 - 2020 | Historiciser l’expertise (au neuvième point, « datation finale »), elle permet d’évaluer le laps de temps qui s’est écoulé entre le moment de la remise de la pétition au bureau de l’autorité et celui de la rédaction de la déclaration. Souvent, il est très court : l’examen a lieu le jour même de la remise de la pétition18. Deux raisons pourraient expliquer qu’il fallait agir vite. L’examen semble être effectué avant toute intervention thérapeutique : pour les cas les plus graves, il ne fallait donc pas traîner, et pour les blessés les plus légers non plus, de peur que les blessures s’atténuent et ne soient plus visibles. Pour les morts, le délai entre la remise de la pétition et l’inspection devait également être très bref, pour les raisons évoquées ci-dessus relatives à l’état du cadavre. Dans le cinquième point, qui est celui de l’introduction du rapport, on trouve l’indication que l’expert s’est rendu sur les lieux où se trouve le blessé, le malade ou le mort, accompagné de l’assistant ; le médecin peut également préciser que la personne examinée (dans tous les cas, vivante) était alitée au moment de l’inspection. La présence d’une date dans cette partie du rapport est exceptionnelle. Enfin, le sixième point, le rapport proprement dit, comprend deux parties. Dans la première, l’expert, qui, parfois, s’associe à l’assistant de l’autorité, indique qu’il a examiné un individu dont il ne donne généralement plus le nom, tandis que la seconde contient la description des observations médicales. En règle générale, l’examen ne concerne qu’une seule personne, mais quelquefois, il y en a plusieurs, comme dans le P.Athen. 34 (nome héracléopolite, 347), où c’est un groupe de bergers qui est inspecté, ou dans le CPR XVIIA 23 (Hermopolis, 322), qui consigne les résultats de l’examen de deux chefs de chantier naval. L’expert peut aussi éventuellement indiquer le lieu où se déroule l’inspection, et si le patient est alité. Malgré quelques différences, tous les verbes attestés pour désigner l’inspection relèvent du champ lexical de la vision. En effet, l’autopsie au sens étymologique du terme était le point capital de toute inspection médicale. C’était le résultat des observations visuelles qui était consigné par écrit dans le rapport, peut-être seulement de manière abrégée, et, en tout cas, de façon accessible à un non-spécialiste, tel qu’un magistrat. On peut supposer aussi que le médecin interrogeait son patient, mais les rapports n’en conservent pas la trace. La deuxième partie du rapport contient la description des observations médicales. L’énumération des blessures relevées par le médecin suit l’ordre a capite ad calcem. La syntaxe est elliptique : l’expert emploie la préposition « sur », suivie du nom de la partie du corps affectée, auquel succède le nom de la blessure. Les différentes observations sont reliées entre elles par la conjonction de coordination 18 | Le BGU II 647 fait exception, puisque l’examen a eu lieu cinq jours après la transmission de la pétition. Cette durée s’explique probablement par le fait que la pétition devait avoir été envoyée dans la métropole du nome, Arsinoé, au sud du nome arsinoïte, alors que l’expert mandaté était établi à Karanis, au nord-est du nome. 35 Antonio Ricciardetto | L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs « et ». Pour une partie du corps, le médecin peut préciser si c’est le côté gauche ou droit qui est atteint ; il peut aussi indiquer le nombre de blessures observées. Une blessure ou un trauma n’est pas toujours seul, mais s’accompagne parfois d’un gonflement ou d’un autre préjudice : dans ce cas, le scripteur utilise la préposition « avec », suivie du nom du gonflement ou du préjudice supplémentaire. La description clinique montre que l’examen, rudimentaire, n’était qu’externe. Le médecin se contentait de décrire ce qu’il observait, sans intervention thérapeutique. Les deux exceptions sont antérieures à la première attestation du titre de « médecin public », qui, semble-t-il, ne dispensait pas de soins, ou, si c’est le cas, du moins, ceux-ci n’étaient plus consignés dans le rapport écrit. Dans la première, le P.Oslo III 95 (Oxyrhynque, 96), le médecin dit avoir soigné (therapeuein) la blessure au médius d’une esclave qui s’est probablement battue. Dans la seconde, le BGU II 647 (Karanis [nome arsinoïte], 22 août 130), le médecin a traité la blessure d’un nommé Mysthariôn : il s’agissait d’une fracture profonde à la tempe gauche, avec de petits éclats de pierres. Le verbe grec utilisé pour signifier « traiter des blessures » (traumatotherapeuein) n’est, à ce jour, pas attesté par ailleurs dans la littérature grecque. Si l’on excepte ces deux verbes relevant de la thérapeutique, le vocabulaire médical des rapports peut être classé en deux catégories : anatomie (33 mots) et pathologie (22 mots). C’est pour la tête et le cou que le lexique anatomique est le plus riche. En effet, sont mentionnés, la tête, le sinciput ou bregma, le sommet du crâne, entre le bregma et l’occiput, la tempe, le front, l’oreille, le sourcil, la paupière, et plus précisément la paupière inférieure, la pommette, le nez, les narines, la dent, le cou. Pour les membres supérieurs, on trouve l’épaule, l’omoplate, c’est-à-dire la scapula, l’acromion, le coude, le bras, le cubitus, la main, ainsi que le doigt, en particulier le médius et le pouce. En ce qui concerne le thorax, le dos et l’abdomen, on trouve quatre mots : ventre (le mot est toutefois restitué), sein, dos, flanc. Dans les rapports médicaux, la partie inférieure du corps est nettement moins bien représentée, ce qu’il faut peut-être expliquer, selon moi, par le fait que le médecin ne ressentait pas la nécessité de décrire la totalité des blessures observées, mais ne mentionnait que celles qu’il voyait en premier, ou qui étaient les plus évidentes ou encore les plus impressionnantes. Les seuls membres inférieurs mentionnés sont le devant de la jambe, le genou, la hanche et la cuisse. On trouve également une occurrence des muscles suspenseurs des testicules. Enfin, le sang et une « membrane fine » sont également mentionnés une fois. Le lexique pathologique est, pour sa part, quasi exclusivement traumatologique. On rencontre des mots qui désignent l’égratignure ou la légère déchirure, l’arrachement de la peau, la coupure, la déchirure, la fracture, la marque de coups (ou l’absence de marque, sur un corps mort), le gonflement, l’ecchymose, 36 HMS 18 - 2020 | Historiciser l’expertise qui peut être légère, le coup reçu (ou l’absence de coup, sur un corps mort), la concentration, en parlant de sang, sur un sein, la blessure, l’écorchure, la dénudation d’un os. Les seuls mots qui ne relèvent pas de la traumatologie sont ceux qui désignent la maladie (qui peut être aiguë), l’état fiévreux, la perte d’audition ou encore le fait de vomir. Dans son ensemble, la terminologie médicale est variée, mais si on examine les rapports séparément, on constate qu’au sein d’un même rapport, c’est souvent la même terminologie qui est attestée19 . Les raisons de l’inspection peuvent être de trois sortes, auxquelles correspond une réponse écrite différente : la plus fréquente est celle qui concerne les agressions. Dans ce cas, les détails médicaux sont particulièrement développés ; en effet, si les agresseurs sont retrouvés et que le rapport est utilisé dans un procès, celui-ci pourra s’avérer accablant pour les coupables. L’état du corps sert de preuve de la violence subie. Pour les morts, l’état du cadavre n’est généralement pas décrit avec précision20 ; seul, le P.Rein. II 92 est plus détaillé, puisqu’il y est spécifié que le défunt ne porte ni blessure, ni marque. L’objectif est surtout de déterminer officiellement la cause de la mort, afin de se prémunir d’une action légale éventuelle (ainsi, dans le P.Rein. II 92, 12, on conclut que l’individu est décédé d’une maladie aiguë) ; parfois, l’expertise semble aussi nécessaire pour obtenir le permis d’inhumer la victime. Enfin, le troisième cas, qui concerne un rapport qui fait suite à des maladies, est peu fréquent21. Là aussi, la description est relativement réduite et les objectifs des rapports ne sont pas clairement établis ; l’important semble de certifier qu’une personne est bel et bien malade, et qu’elle ne feint pas de l’être, peut-être pour échapper aux liturgies, à savoir aux obligations de charges de service public. Qui sont les expéditeurs du rapport ? Ce sont presque toujours des médecins, mais l’assistant du bureau du magistrat peut aussi être l’auteur unique ou secondaire du document. Les seules exceptions sont le P.Oxy. III 476, où les experts qui inspectent la victime sont deux fossoyeurs, ainsi que le P.Mert. II 89, dans lequel on apprend que l’examen a été conduit par un assistant de l’autorité. Dans les plus anciens rapports, le médecin est simplement dénommé iatros, mais, à partir de 173, on voit survenir un changement dans son appellation : en effet, désormais, au mot « médecin » (iatros) est accolé le qualificatif « public » 19 | C’est particulièrement évident dans le P.Athen. 34, où le seul terme de pathologie utilisé est trauma, « blessure ». 20 | Une, et peut-être deux, pétitions (C.Pap.Gr. II, app. 1, PSI inv. 4153 [ ?]), un ordre, qui contient aussi une copie de pétition (P.Oxy. III 475), et trois rapports médicaux (P.Oxy. III 476 et I 51, ainsi que P.Rein. II 92), concernent l’inspection de corps morts. En outre, l’inspection médicale mentionnée dans le P.Oxy. XVII 2111, une copie d’extraits de comptes rendus d’audience (voir infra), a été conduite sur une personne décédée de mort violente. 21 | Seuls deux rapports sont relatifs à une maladie : PSI inv. 3241 et P.Oxy. VI 896. 37 Antonio Ricciardetto | L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs (dêmosios). Ce nouveau titre du praticien doit probablement être rapproché d’un décret promulgué vers 150 par Antonin le Pieux22, qui vise à réduire le nombre de médecins exempts de liturgies, à cinq, sept ou dix par ville23, en fonction de la taille de celle-ci24. Même si, avant cette date, les médecins ne portaient pas ce titre, ils étaient néanmoins reconnus par l’État qui les avait nommés25. Les candidats au titre de « médecin officiel » devaient obligatoirement passer un examen qui existait déjà avant la promulgation de l’édit et qu’on appelle la dokimasia (latin probatio) 26. Celle-ci ne consistait pas en un contrôle de leurs compétences professionnelles ; les médecins étaient admis lorsqu’un corps administratif, probablement le conseil (boulê), approuvait leur candidature27. Lorsqu’ils avaient passé l’examen, ils étaient dits dedokimasmenoi (probati) 28. Ce nouveau statut leur apportait des privilèges, comme l’exemption de liturgies ; les raisons de la limitation du nombre de médecins exemptés étaient essentiellement économiques. Dans ces rapports, il n’y a généralement qu’un seul médecin déclarant. Toutefois, dans ceux provenant d’Oxyrhynque, on peut en trouver deux, trois, voire quatre29. Le nombre de médecins publics reste inférieur à la limitation prévue par le décret d’Antonin le Pieux, mais il est vrai qu’on ne sait pas si d’autres médecins publics pratiquaient dans la même ville au même moment. Le médecin public avait une fonction légale, qui, pour les victimes non décédées, ne prévoyait aucune dispense de soins30. Ceux-ci n’étaient 22 | Ernst Boswinkel, « La médecine et les médecins dans les papyrus grecs », art. cité, p. 185, est le premier à avoir rapproché l’apparition du médecin public du décret d’Antonin le Pieux. 23 | On connaît des médecins se plaignant qu’on leur a imposé des liturgies : voir P.Fay. 108 (Ptolémaïs Évergêtis [nome arsinoïte], 17.9.169 ou 170) et P.Oxy. I 40 (Oxyrhynque, fin du iie /début du iiie s.). 24 | Digeste, 27, 1, 6, 2-4 ; voir également 50, 9, 1. 25 | P.Oslo III, p. 101 ; Ernst Boswinkel, « La médecine et les médecins dans les papyrus grecs », art. cité, p. 184. 26 | Sur le sens du mot dokimasia dans les papyrus, voir Giorgio Zalateo, « Un nuovo significato della parola δοκιμασία », Aegyptus, 37, 1957, p. 32-40 ; sur cet examen, voir également Marguerite Hirt Raj, Médecins et malades de l’Égypte romaine. Étude socio-légale de la profession médicale et de ses praticiens du i er au ive siècle ap. J.-C., Leyde/Boston, Brill, 2006, p. 109. 27 | Naphtali Lewis, « Exemption from Liturgy in Roman Egypt », dans Atti dell’XI Congresso Internazionale di Papirologia. Milano, 2-8 settembre 1965, Milan, 1966, p. 515-518 ; Alan K. Bowman, The Town Councils of Roman Egypt, Toronto, A.M. Hakkert, 1971, p. 86 n. 42. 28 | Dans les trois rapports rédigés à Hermopolis, leur titre est plus développé encore : « médecin public parmi ceux inclus dans le nombre fixé des probati ». Cette particularité semble être une spécificité locale, puisqu’elle ne s’observe, à ce jour, que dans la métropole du nome hermopolite. 29 | Un médecin (par ordre chronologique des papyrus) : P.Oslo III 95, PSI inv. 3241 et 3242, P.Oxy. LXXX 5255, BGU II 647, P.Oxy. III 476, I 51, LXXX 5256, XLV 3245, P.Mert. II 29, P.Oxy. LIV 3729, BGU III 928, P.Oxy. LXXX 5257, LXIV 4441 col. I et II, PSA Athen. 34, P.Rein. II 92. Deux : P.Oxy. LXXX 5254, PSI V 455, P.Oxy. VI 896. Trois : P.Oxy. LXVI 4529. Quatre : P.Oxy. LXIV 3195, LXVI 4528, LXIII 4370. 30 | On a vu plus haut que la situation est différente dans les rapports médicaux antérieurs à l’apparition du titre de « médecin public », où l’expert constate les blessures et, ensuite, précise les avoir traitées. 38 HMS 18 - 2020 | Historiciser l’expertise vraisemblablement pas la priorité dans la procédure médico-légale, où il importait avant tout de décrire l’état du corps dans un document légal, afin de permettre aux victimes de se réserver un droit de justice pour un futur procès. Même s’il ne semble pas y avoir eu de réglementation à ce propos, il est fort probable que la population savait qu’il fallait d’abord examiner le corps des victimes de violences avant d’effectuer tout traitement31. Les détails de la charge du médecin public, tels que les rapports juridiques qu’il entretenait avec sa cité, ses honoraires, la durée de son mandat ou son caractère héréditaire, ne sont pas connus. On ne peut donc pas savoir si, à côté de sa fonction légale, ce médecin possédait un cabinet privé où il soignait des patients (peut-être sans son statut de « médecin public »). Antérieurement, à l’époque ptolémaïque (305-30 av. J.-C.), il ne semble pas que le médecin ait eu de rôle légal32, même s’il est vrai qu’on connaît une charge de médecin public, comme en témoignent, d’une part, l’impôt annuel iatrikon qui servait à l’entretien du médecin officiel33, et, d’autre part, le témoignage de Diodore de Sicile, selon qui des médecins rétribués sur des fonds publics dispensaient des soins gratuitement à travers toute l’Égypte34. Peut-être celui-ci était-il employé, à l’occasion, sur requête de particuliers, comme expert dans un procès, à l’époque lagide ; on n’a cependant conservé aucun témoignage qui confirmerait une telle hypothèse35. En réalité, comme l’ont montré Darell W. Amundsen et Gary B. Ferngren puis, plus récemment, Fritz Mitthof, la pratique médico-légale attestée dans les rapports est intimement liée au système judiciaire romain, dans lequel elle trouve son origine, excluant par là toute spécificité égyptienne. Cependant, elle ne devait être, ni obligatoire, ni généralisée, et c’est peut-être là 31 | John Rea, dans P.Oxy. LVIII, p. 34. C’est ce qui transparaît dans une pétition écrite à This (P.Oxy. LVIII 3926), dans laquelle Aurêlia demande que son mari et son fils, qui ont tous deux été agressés, soient examinés par un assistant, « afin qu’ils puissent recevoir le traitement nécessaire ». 32 | Sur les raisons de l’absence d’experts officiels à l’époque ptolémaïque, qui tiennent à la nature du système légal ptolémaïque, voir Darell W. Amundsen et Gary B. Ferngren, « The Forensic Role of Physicians in Ptolemaic and Roman Egypt », art. cité, p. 341-342. 33 | Ibid., p. 338-339. Payé en nature ou en grains, et prélevé, seul ou avec d’autres taxes, dans les villages, pour aboutir dans les banques de l’État, l’impôt iatrikon est attesté en Égypte ptolémaïque par plusieurs inscriptions et papyrus grecs des iii/iie siècles avant notre ère. 34 | Diodore, Bibliothèque historique, I, 82, 3 ; Darell W. Amundsen et Gary B. Ferngren, « The Forensic Role of Physicians in Ptolemaic and Roman Egypt », art. cité, p. 338. 35 | Ibid., p. 352 : Darell W. Amundsen et Gary B. Ferngren se fondent sur deux facteurs : 1) les lois qui gouvernent la population grecque de l’Égypte ptolémaïque sont inspirées des lois des cités grecques, dont Athènes, où l’on sait que des médecins appelés par des particuliers pouvaient servir de témoins et d’experts (sur cette question, voir Darell W. Amundsen et Gary B. Ferngren, « The Physician as an Expert Witness in Athenian Law », BHM, 51, 1977, p. 202-213) ; 2) dans l’Égypte ptolémaïque, on pouvait avoir recours à des experts dans des métiers manuels, par exemple, des tisserands, pour avoir un avis professionnel dans des questions juridiques ; peut-être existait-il une fonction similaire pour les médecins. 39 Antonio Ricciardetto | L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs l’une des raisons pour lesquelles on n’en trouve aucune mention dans les textes juridiques. Quant à l’absence d’attestations d’une telle pratique en dehors de l’Égypte, elle s’explique par la nature du matériau des documents en question36 . Le P.Lips. I 42 (Hermopolis, 391) constitue un exemple de ces rapports médicaux. Acquis en 1902 par Ludwig Borchardt, c’est le rapport médical le plus récent conservé à ce jour provenant d’Hermopolis. Il est écrit sur un coupon de papyrus, dont l’état de conservation est mauvais, mais, heureusement, l’existence d’un double, le P.Lips. inv. 7, qui est par endroits mieux conservé, permet de restituer bon nombre de lacunes. Daté de 391, le rapport est adressé à Aurêlios Kuros, fils de Philammôn, nyctostratège en fonction à Hermopolis. Grâce à la datation finale, on est en mesure de préciser qu’il a été rédigé durant le mois de Pharmouthi, à savoir entre le 27 mars et le 25 avril. L’auteur en est le médecin public Aurêlios Plousios, fils d’Hermodôros. Comme dans les autres rapports retrouvés à Hermopolis, ce dernier faisait partie de ceux inclus dans le nombre fixé des probati (« approuvés »). Il est accompagné d’un assistant nommé Aurêlios Papnouthios, fils d’Herminos, lui aussi hermopolitain : il s’agit probablement de l’assistant du nyctostratège37 . À la suite d’une attaque, Pinoutiôn, fils de Dios[...], ancien membre du Conseil d’Hermopolis, a rédigé une pétition demandant qu’on fasse un rapport écrit sur sa condition réelle. Le médecin rapporte qu’après s’être rendu au domicile de l’ancien magistrat, en compagnie de l’assistant, il l’a examiné ; celui-ci présente un gonflement au sourcil gauche, avec une ecchymose. La description se poursuit : l’homme a aussi un gonflement sur la pommette droite avec une 36 | Darell W. Amundsen et Gary B. Ferngren, « The Forensic Role of Physicians in Ptolemaic and Roman Egypt », art. cité, p. 353 ; Eid., « The Forensic Role of Physicians in Roman Law », BHM, 53, 1979, p. 53 ; Fritz Mitthof, « Forensische Medizin in römischen und spätantiken Ägypten », art. cité, p. 308-309. Je souscris à l’avis du papyrologue allemand qui exclut toute spécificité égyptienne ; Darell W. Amundsen et Gary B. Ferngren, « The Forensic Role of Physicians in Roman Law », art. cité, p. 53-55, soutiennent pour leur part que la fonction légale des médecins en Égypte romaine était limitée à cette seule province. Tout en soulignant l’influence du droit romain sur l’origine de la pratique médico-légale, les deux chercheurs insistent sur la singularité administrative et juridique de l’Égypte, par rapport aux autres provinces de l’Empire ; ils se demandent également si les papyrus constituent un reflet fidèle de l’application du droit romain, et si ce dernier était appliqué de manière uniforme dans l’Empire. Mais ils reconnaissent en même temps que rien ne permet de prouver le contraire, à savoir que la situation offerte par les rapports médicaux d’Égypte pouvait être identique à celle du reste de l’Empire. En outre, les « médecins publics » pourraient correspondre aux archiatri populares attestés dans d’autres régions, dont on ne connaît cependant pas de fonction légale. 37 | Comme l’écrit Jacqueline Lallemand, L’administration civile de l’Égypte de l’avènement de Dioclétien à la création du diocèse (284-382), Bruxelles, Palais des Académies, 1964, p. 165, on sait en effet que le nyctostratège disposait « d’un personnel subalterne varié et, sans doute, assez nombreux sur lequel nos documents nous renseignent fort mal ». 40 HMS 18 - 2020 | Historiciser l’expertise ecchymose38. Après la pommette, il est question du nez, dont la partie gauche présente une écorchure (psêgma) 39. L’ex-magistrat est atteint enfin d’un gonflement aux testicules et plus précisément aux crémasters (kremastêres) 40. C’est sur cette observation que s’achève la description médicale. Le rapport se poursuit par une phrase de l’assistant, qui dit avoir été présent au moment de l’inspection et avoir observé les blessures. C’est le seul de nos textes où l’assistant confirme les propos du médecin d’une manière explicite et dans le corps même du document. Le médecin et l’assistant précisent ensuite avoir transmis le rapport au nyctostratège, afin qu’il soit informé des résultats de l’expertise ; on trouve aussi une clause stipulatoire : « ayant été formellement interrogés, ils ont donné leur consentement ». Cette formule, qui est la traduction de la tournure romaine stipulatus spopondi, est absente des autres rapports médicaux, mais on la retrouve fréquemment dans les actes légaux, comme les contrats de vente. « Cette clause, écrit Joseph Mélèze-Modrzejewski, peut donner à toute convention quelle qu’elle soit la valeur d’une obligation légale abstraite créatrice d’effets exécutoires en justice41 ». Dans notre rapport, puisqu’on n’a pas affaire à un contrat, il ne s’agit pas d’une véritable stipulation romaine, mais d’« une clause de style, ajoutée artificiellement à des actes qui suivent les modèles locaux42 ». 38 | Antonio Ricciardetto, « La réponse du médecin : les rapports d’inspection médicale écrits en grec sur papyrus (i er -ive siècles) », art. cité, p. 140 n. 24. 39 | Dans la littérature, le substantif psêgma se dit de ce qu’on enlève en raclant ou en grattant. Il est majoritairement employé pour désigner la raclure ou la rognure, en particulier d’or, d’où son utilisation dans le sens de « poussière d’or » : voyez notamment Hérodote, IV, 195 ; Eschyle, Agamemnon, 442, en parlant de la cendre. Il s’emploie aussi à propos de métaux et de matériaux comme l’argent, le bronze, le bois, la gomme, etc., et pour désigner des grains de poussière ou de terre (comparer Aristote, Du ciel, IV, 6, 1 [313a20]). En revanche, on ne le trouve pas dans le lexique médical, et notre rapport et son double sont aussi les seuls papyrus à attester ce substantif qui désigne vraisemblablement une raclure sur le nez. 40 | Le mot kremastêr désigne un muscle suspenseur, et, lorsqu’il est employé au pluriel, il fait référence en particulier au muscle par lequel les testicules sont suspendus. C’est chez Galien (129-216) qu’apparaît pour la première fois le mot dans ce sens : voir, ainsi, Galien, De sem., II, 5 (p. 188, 14 et suiv. De Lacy) ; De musc. dissect., 25.7 (p. 178, 13 Garofalo-Debru) ; Ibid., 26 (p. 181, 1-8 Garofalo-Debru). On trouve aussi le mot attesté chez Soranos d’Éphèse (c. 100), où il désigne les suspenseurs des ovaires (Soranos, Maladies des femmes, I, 4, 104 [t. I, p. 12 Burguière-Gourevitch-Malinas]), tandis que, pour son concitoyen Rufus (iie siècle), le kremastêr correspond au canal déférent : Rufus, Du nom des parties du corps, 197 (p. 160, 14-161, 2 Daremberg-Ruelle) ; voir également, du même, Sur le satyriasis et la gonorrhée, 10 (p. 68, 5 Daremberg-Ruelle) ; Pollux, II, 173. Par extension, le mot en est venu à désigner les testicules proprement dits : c’est le cas, notamment, dans un passage de la Collection d’hippiatrie grecque attribué à Tibérius, inconnu par ailleurs : Hipp. Berol. 30.3 (CHG I, p. 151, 4). 41 | Joseph Mélèze-Modrzejewski, « Chronique. Droits de l’Antiquité. Égypte gréco-romaine et monde hellénistique (Première partie) », RHD, 55, 1977, p. 142. 42 | Id., « La règle de droit dans l’Égypte romaine », dans Proceedings of the XIIth International Congress of Papyrology. Ann Arbor, 13-17 August 1968, Toronto, A.M. Hakkert, 1970, p. 362. 41 Antonio Ricciardetto | L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs Le rapport s’achève par la datation, qui se limite à l’indication du mois et du jour. La mention du jour exact n’est pas conservée. Viennent enfin les signatures, d’abord, celle du médecin, puis, celle de l’assistant, qui, étant analphabète, a demandé à un tiers, Aurêlios Phibiôn, fils de Phibios, également originaire d’Hermopolis, d’écrire à sa place, en sa présence. Le compte rendu d’audience En cas de procès, le rapport qui a été établi peut servir de preuve dans un tribunal. Il est alors mentionné dans des comptes rendus d’audience. Malgré la masse de fragments de ces documents qui a pu être tirée des sables d’Égypte, seuls deux papyrus, fortement mutilés, font référence à un tel rapport (P.Oxy. XVII 2111 et XII 1502). Ceux-ci partagent plus d’un point commun : ils proviennent tous deux d’Oxyrhynque et sont datés, l’un, un peu après 137, l’autre, après 260. L’affaire, qui est présentée devant le préfet d’Égypte, concerne dans les deux cas un héritage ; dans le premier, la victime est décédée, tandis qu’il n’est pas possible de le déterminer pour le second43. Du point de vue de la forme, tous deux sont des copies d’extraits de comptes rendus d’audience (antigrapha ex hypomnèmatismôn). Le premier est, semble-t-il, une copie légèrement postérieure au procès-verbal originel ; elle se trouve sur un rouleau qui a par la suite été retaillé et remployé pour noter un document de nature différente. En revanche, l’examen autoptique du second papyrus m’a permis de l’identifier comme un fragment de tomos sugkollêsimos44 . Les deux colonnes du P.Oxy. XVII 2111 contiennent les restes de trois procès qui se sont tenus devant le préfet d’Égypte, Petronios Mamertinos, dont on sait qu’il était en fonction entre le 11 novembre 133 et le mois d’août ou de septembre 137. On peut donc dater les procès de ces années-là. Chaque affaire est séparée de la suivante par un long trait horizontal placé dans l’interligne. La troisième affaire nous intéresse plus particulièrement ici : elle commence à la ligne 20 de la colonne I et se poursuit sur toute la colonne II (et peut-être même au-delà). La perte de la partie gauche de la colonne I et de la majeure partie de la colonne II ne permet pas de la suivre dans tous ses détails. Néanmoins, il semblerait que l’objet du procès soit un différend successoral entre un homme, Sarapiôn, et une femme, Ptoléma, le premier contestant l’héritage acquis par 43 | Contrairement à ce que j’indique dans Antonio Ricciardetto, « La réponse du médecin : les rapports d’inspection médicale écrits en grec sur papyrus (i er -ive siècles) », art. cité, p. 142 n. 30, on ne sait pas si la personne qui a fait l’objet du rapport mentionné dans le P.Oxy. XII 1502 est vivante ou décédée. 44 | L’autopsie a été réalisée à la British Library de Londres, où est conservé le papyrus, le 20 juin 2014. 42 HMS 18 - 2020 | Historiciser l’expertise la seconde ; on ne connaît pas leurs liens de parenté. Selon Sarapiôn, Ptoléma n’avait « qu’un droit d’usufruit, lui-même étant l’héritier non-bénéficiaire de la pleine propriété de la succession45 ». L’affaire a tourné au drame : pour obtenir son héritage, Sarapiôn en est venu aux mains avec Ptoléma46. En lui serrant la gorge, il l’a étouffée : elle en est morte. Ce fait est répété quelques lignes plus loin. Une plainte a été déposée – peut-être est-ce une référence à la pétition remise à l’autorité, qui est probablement le stratège47 –, à la suite de laquelle un assistant du stratège et un médecin, qui, dans les années 130, n’est pas encore « public », ont été mandatés pour examiner la défunte48. Conduite par un homme accompagné d’un assistant, l’inspection a dû servir à constater le décès et à en confirmer la cause. Les détails de la suite du récit sont plus difficiles à reconstruire, mais il semblerait que Sarapiôn ait avoué son crime. Nous ne connaissons pas l’issue du procès, mais il est probable que, comme le prévoit le § 36 du Gnômôn de l’Idiologue, ses biens ont été confisqués49 . ⁂ Illustration concrète de l’application du droit romain dans la province d’Égypte, les rapports médicaux, et la procédure dans laquelle ils s’insèrent, initiée à la demande d’une partie plaignante, constituent incontestablement l’une des premières attestations d’une démarche médico-légale (du moins, dont on a conservé des traces écrites), témoignant dès lors, si besoin était, de son existence déjà à la période antique. Ils montrent aussi l’autorité de l’expertise médicale, ainsi que celle de l’expert, qui est le plus souvent un médecin. À partir de la seconde moitié du iie siècle, celui-ci fait partie d’un corps travaillant au service de l’État, qui le sollicite afin de disposer de son opinion avertie. En tant qu’élément 45 | Voir la plaidoirie d’Apollônios, avocat du demandeur, aux lignes 21 à 24, qui sont en partie reconstituées ; Barbara Anagnostou-Canas, Juge et sentence dans l’Égypte romaine, Paris, L’Harmattan, 1991, p. 125. 46 | D’après les lignes 27-28, il semblerait que Sarapiôn n’était pas seul au moment des faits ; toutefois, rien n’est moins sûr. 47 | Apolinarios est le stratège en fonction, pour le nome oxyrhynchite, entre le 12 mars 134 (P. Oxy.Hels. 19, 1) et le 28 janvier 138 ; avant cette date, on connaît un Asclépiadês, dont la dernière attestation datée avec précision en tant que stratège remonte au 22 décembre 131 (P.Oxy. XLIX 3470, 3 et 3471, 3). 48 | Notons qu’à ce jour, on n’a pas conservé de rapport relatif à un décès par strangulation. 49 | Ce recueil d’extraits de règlements établis par Auguste, puis complétés et remaniés par des empereurs, par le Sénat ou par d’autres hauts fonctionnaires, nous renseigne sur les compétences, essentiellement fiscales, de l’idiologue et de ses services. Il est surtout connu par une copie sur papyrus (BGU V 1210), provenant du nome arsinoïte et datée du règne d’Antonin le Pieux. Elle avait été écrite au verso de comptes de sitologues, peut-être par un fonctionnaire, pour son usage pratique. Le § 36 correspond aux lignes 101 à 103 du papyrus : « sera confisqué le patrimoine des personnes qui ont été condamnées pour meurtre ou pour infraction grave ou qui sont volontairement parties en exil sous une inculpation pour une même raison ». 43 Antonio Ricciardetto | L’expertise médico-légale dans l’Antiquité : le témoignage des papyrus grecs de preuve de la violence subie, de la cause de la mort, ou de la réalité d’une maladie, l’expertise aide en effet les autorités administratives et judiciaires à prendre une décision ; dans ce cadre, la médecine joue clairement le rôle de « savoir mobilisé », pour reprendre une expression de Marilyn Nicoud dans l’introduction à ce volume50 . Il n’y a pas à douter que les recherches ultérieures en la matière bénéficieront de la publication des milliers de papyrus encore inédits : ainsi, la parution, en 2014, du volume LXXX des Oxyrhynchus Papyri, a permis non seulement d’augmenter de quatre unités le nombre de rapports médicaux connus à ce jour (P.Oxy. LXXX 5254-5257, dont le plus ancien rapport connu à ce jour, le P.Oxy. LXXX 5254, c. 89-94 apr. J.-C.), mais aussi d’observer que des équipes de plusieurs médecins (en l’occurrence, deux, dans le P.Oxy. LXXX 5254) ne sont pas seulement attestées au ive siècle, comme on le pensait jusqu’alors, mais déjà au i er siècle. Dans l’avenir, de nouvelles découvertes, qui ne sont donc nullement à exclure, devraient permettre d’accroître nos connaissances sur les rapports parfois étroits qu’ont entretenus la médecine et le droit dans l’Égypte grécoromaine et byzantine. 50 | Voir l’article de Marilyn Nicoud, « Faut-historiciser l’expertise ? L’autorité de l’expert en médecine dans les sociétés antiques et médiévales », dans ce volume.
조엘 샹들리에와 마릴린 니쿠드 284 그러므로 이방인 다 폴리뇨 조약의 경우를 살펴보는 것이 적절하다. 정확히 무엇이 제대로 의료 합법적인지 확인하기 위해 어쩌면 총계를 막을 수 있었던 것을 이해하기 위해서도 우리가 이미 존재하는 것을 본 지식의 형식화, 다음과 같은 방식으로 이론 의학의 작품에서. 애초에 기억해야 할 것은 이방인의 사역이 da Foligno는 시간을 엄수하는 대답으로 자신을 제시합니다. 그것은 진짜 조약이었다. 저자는 서문에서 다음과 같이 발표합니다 그는 자신의 대답을 세 부분으로 나누고 싶었습니다 학문적 논쟁의 모델에 따라 다루어진 질문들: 그는 먼저 왜 인간에게 다른 동물과 마찬가지로 단일하고 규칙적인 임신 기간, 그렇다면 자연 임신 시간은 얼마이며, 마지막으로 기간은 엄격하거나 특정 위도를 허용합니다. 다시- 첫 번째 질문에 답하십시오. 이방인 da Foligno는 본질적으로 다음과 같은 설명에 의존합니다. "철학자들" – 이해하라, 자연 철학자들: 첫째, 왜냐하면, 인간은 서로 매우 다르기 때문입니다. "천사의 본성에 접근하는 것은 그들의 자질입니다. 지성", 다른 사람들은 "거칠음으로 짐승"입니다. 175 ; 둘째, 생활 방식의 다양성이 이러한 다양성을 강조합니다. 마침내 인간의 상상력이 신체에 작용하여 수정할 수 있기 때문입니다. 그것의 자연적인 기능. 임신 기간에 대한 두 번째 질문에 대한 답은 가 토론의 핵심입니다. 젠틸레 다 포글리노는 다음과 같이 말한다. 모든 철학자들은 자연스러움을 인정하는 데 동의한다 7개월, 9개월, 10개월 기간 176 . 이러한 기간을 정당화하기 위해 저자는 먼저 히포크라테스의 말을 인용하는데, 히포크라테스는 "가장 뛰어난 철학자였다 그리스인", 아이가 머물 수 있다는 생각에 반발하기 위해 자궁에서 10개월 이상. 그러나 가장 큰 문제는, 물론, 자연적인 임신 기간의 불가능성 여덟 달이라는 기간이 더 이상하게 느껴졌다 7개월과 9개월은 자연스러웠다. 이 말은 고대의 전통에 기원을 두고 있다 임신 8개월을 위험한 달로 만들기: 175 이방인 다 폴리뇨, 슈퍼 레게 septimo mense, p. 123 : Homo est multe va- rietatis in sua specie, unde quidam appropinquant propter bonitatem intellectus ad Naturam 안젤리캄, UT Propter Sperimentum SCTIS; quidam autem appropinquant Propter ruditatem ad bruta. 176 위와 같음. : Sciendum est autem quod quedam sunt tempora partus in homine, in quibus omnes phylosophi conveniunt, quedam autem sunt tempora, in qui- 버스 omnes non conveniunt. Tempora autem naturalia partus hominis, in quibus omnes predicit phylosophi conveniunt, sunt VII menses et IX et X.
법과 의학 사이 285 유사 히포크라테스 논문 생후 8개월 태아의, 라고 설명했다 그 날짜에 태어난 태아는 생존할 수 없었다는 것은 다양한 요인 덕분입니다. 의학적 주장, 특히 숫자에 대한 계산에 의해 의 경우 중요한 날과 비교할 수 있는 일 질병 177 . 젠틸레 다 폴리뇨(Gentile da Foligno)가 이 프로를 위해 예약한 긴 치료 Cino da의 핵심이 아닙니다. 피스토이아는 그가 단순한 대답을 하는 것을 목표로 하지 않는다는 것을 보여준다 사건에 대해 시간을 엄수하지만 과학적 지식을 생산하기 위해 일반. 이방인 다 폴리뇨는 사실 잘 알고 있다 8개월 된 태아에 관한 고대 전통. 그는 아니오를 언급합니다. 태아의 여러 단계에 대한 산술적 설명 서로 다른 자연 지속 시간을 정당화하는 데 사용되는 행렬에서, 그러나 그는 "이 이유는 많은 사람들에게 충분하지만 가장 미묘한 (...) 중 사실이 아닙니다"라고 올바르게 지적했습니다 저자 간의 차이 178 . 그런 다음 그는 두 가지 원인을 제안했습니다 여덟째 날에 출산할 수 없음을 정당화하는 것 월, 하나는 여덟 번째 달에 태어난 아이가 지난달의 노력에 지쳐서 실행 가능하지 않습니다. 다른 하나는 다른 행성의 활동과 관련이 있습니다. 만약 우리가 의 저자가 제시한 첫 번째 설명에서 생후 8개월 태아, 두 번째는 점성술 전통에서 유래했습니다 헤르메스-아랍 기원. 몇몇 점성가들은 실제로 임신 기간의 각 달을 일곱 달 중 하나와 연관시킬 것을 제안했습니다 첫 번째는 토성, 두 번째는 목성, 두 번째는 화성입니다. 셋째는 태양, 넷째는 태양, 다섯째는 금성, 여섯째는 수성, 일곱째는 달; 도착하면 이 시점에서 사이클이 다시 시작되었고 지배를 얻었습니다 여덟 번째 달은 토성, 아홉 번째 달은 목성, 등등 179 . 이러한 이유로 토성은 춥고 건조한 성질로 인해 해로운 영향을 미쳤고, 아이는 그의 지배 아래 태어났고, 그의 생존은 위태로워졌으며, 이것은 여덟 번째까지 출생의 부자연스러운 본질을 설명했습니다 달. 더욱이 젠틸레 다 폴리뇨(Gentile da Foligno)는 일곱째 달, 그러므로 다른 별들이 끝나고 달이 축축하니, 177 R. Joly가 편집 및 번역한 텍스트, 파리, 1970 (큐프), 147-181쪽. 178 이방인 다 폴리뇨, 슈퍼 레게 septimo mense, p. 124 : 좌골 신경통, 도민 Cyne, quod quamvis ista ratio multis sufficiat subtilissimis (...). 에르고 비율 사전 cedens non est vera. 179 이 이론과 그 기원에 관해서는 C. B. Burnett의 기사를 보라. 이 행성과 배아의 발달안으로 인간 배아. 아리스토텔레스 그리고 아랍과 유럽의 Trditions, G. R. Dunstan 편, Exeter, 1990, pp. 95-112.
조엘 샹들리에와 마릴린 니쿠드 286 아이는 살 수 있지만 이것은 불가능합니다. 토성의 부정적인 영향으로 인해 180 . 만큼 더 긴 기간, 즉 11 개월 및 12 개월, 그는 아리스토텔레스를 포함한 일부 사람들이 다음과 같이 보고한다고 언급합니다. 일부 예외적 인 경우 또는 남아 있다고 주장하는 Pietro d' Abano가 있습니다 그의 어머니의 자궁 속에서, 열 달 열흘 동안, 그들이 존재할 수 있습니다. 그러나 그는 히포크라테스의 의견을 선호한다고 선언한다. [그의] 제재는 정당하게 신뢰할 만하다" 181 . 자연 임신 기간에 대한 긴 여행 따라서 여러 주장에 의해 뒷받침되는 남자는 이탈리아의 의사, 인간에게 유리한 3개월 확인 출생, 일곱째, 아홉째, 열 번째, 그리고 그 외 불가능하지는 않더라도 불리한 6, 8, 11. 따라서 Cino에게 주어져야 할 대답은 다음과 같을 것이라고 생각할 수 있습니다. 명백한 사실: 문제의 아이는 6년 후에 태어났을 수 없다 몇 달 며칠 동안 법에 어긋납니다 에서 소화. 그러나 그러한 진술은 정확할 것입니다 젠틸레 다 폴리뇨(Gentile da Foligno)가 제기한 세 번째 질문에서 토론되었다. 해당 마침표를 엄격하게 해석해야 하는 경우, 아니면 큰 차이로? 물론 이것이 질문의 핵심입니다 의료법정책(medico-legal policy)은 일반적인 규칙(a 6개월 또는 8개월에 생존 가능한 출산은 불가능) 특정 사례에. 그러므로 이방인의 다(大)를 보는 것은 놀라운 일이 아니다 폴리뇨는 서두에서 이 질문이 "매우 불확실하다"고 밝혔다. 에 몇 가지 예를 통해 그는 다음과 같은 일이 불가능하다는 것을 보여줍니다. 이 기간을 너무 엄격하게 고려하는 것은 많은 기간 때문입니다. 특정 조건이 영향을 미칠 수 있습니다. 예를 들면 10개월 동안 태아가 빠져나가는 것은 다음과 같은 사실로 설명됩니다. 히포크라테스에 따르면 식량이 부족하다는 것, 후자는 오히려 어머니의 가슴으로 젖을 생산하도록 지시한다. 하지만 젠틸레 다 폴리뇨(Gentile da Foligno)는 또는 아기가 이것을 앞당기거나 늦출 수 있습니다. 180 이방인 다 폴리뇨, 슈퍼 레게 septimo mense, p. 125 : 7° mense domi- natur Luna, sui humiditate nutrimentum augens et in VII° mense est completum Dominium planetarum: si tunc nascatur puer potest vivere. VIII° mense recipit에서 dominium Saturny qui est frigidus et sicchus, vitam corrumpens, et si nascatur VIII° moritur에서. 181 이방인 다 폴리뇨, 슈퍼 레게 septimo mense, p. 126 : 에르고 디스코르디아는 inter Ypocratem cui nostra sanctio fidem dat et merito, et inter Aristotelem et re- liquos multos phylosophos, in tantum quod Ypocrates dicit quod quando crederit mulier parere in XI° mense, illud est propter deceptionem, quia non computat bene tempus initiale 함침.
법과 의학 사이 287 출구. 마찬가지로 저자는 Avicenna가 언급 한 사례를 인용하고 아리스토텔레스는 생후 7개월 이전에 태어났다 182 . 따라서 Gentile da Foligno는 출생은 그 달이 com- 또는 적어도 그 대부분이 기간에 포함됩니다. 임신의. 그러나 의 권위를 인용하여 De formatione corporis 자궁 속의 휴머니(humani in utero) 로마의 질(Gilles of Rome)에 대해 그는 다음과 같이 단언한다. 일곱째 달의 시작은 사실 여섯째 더하기 달과 일치한다 단 며칠 만에 "수비에 많은 도움이 됩니다 형제들의" 183 . 그러므로, 달의 한계는, 이것에 따르면, inter- 매우 느슨하게 생각 : 사실, 그것은 가능합니다 아이가 7일에 태어난다고 생각하면 e 몇 개월만 6 일 말부터 며칠이 지났습니다. e , 그러나 다른 방향으로도, 8에 있는 경우 e . 어쨌든, 로마의 질 (Gilles of Rome)에 대한 언급은 논쟁을 종결하기에 충분합니다 6개월 며칠 후에 출산할 수 있지만, 드물게, 임신 시간의 부정확성으로 인해 가능합니다 인간에서, 그리고 사람이 해석해서는 안된다는 사실 산술 계산 또는 산술 계산과 관련된 기간 행성의 영향. Gentile da Foligno는 이론을 길게 제시한 후 따라서 주제에 대해 다소 갑작스러운 방식으로 중단됩니다. 6개월 정도 후에 출산할 가능성이 있음을 확인합니다. 따라서 법의 확인을 확인합니다. 의심할 여지 없이 다음과 같은 일이 필요합니다 진정한 신념은 아닐지라도 규범에 대한 어느 정도의 존중을 보십시오. 그러나 그는 매우 흥미로운 말로 논문을 끝맺는다. "그렇다면, 치노 사부님, 이 점에 대해 질문이 생길 때 법학자들 사이에서, 그들은 정직한 의사들을 받아들인다. 태어난 아이와 그 어머니의 안색을 고려하여 메이 그가 자기 남편에게서 태어났는지 아니면 그의 형제에게서 태어났는지 말하라" 184 . 이방인 다 폴리뇨를 위해, 그러므로, 학식 의학에 의해 제공되는 일반적인 규칙, 그리고 그것은 필요합니다 그의 논문 전반에 걸쳐 방금 지정했으며 확실히 유용합니다. 극한의 한계를 설정하고, 예를 들어, 법률. 이것이 그가 "7의 법칙"에 의문을 제기하지 않는 이유입니다. e month"는 매우 광범위한 특성으로 인해 모든 것을 포함하는 것으로 보입니다. 특별한 경우. 그러나 에서 182 위와 같음., 127쪽. 183 위와 같음., p. 127-128: Tamen Egidius Romanus inuit, quod si aliquid capiat de mense, quod sufficiat, ut, si nascatur in VI mensibus et aliquibus diebus de 셉티모. Et istud multum facit ad fratrum excusationem. 184 위와 같음., p. 128: Ergo, Domine Cyne, quando de his cadit questio inter iu- risperitos, accipiant medicos probos, qui, considerata complexione puery nati et Mülieris, poterunt dicere si natus ex marito vel ex fratre.
조엘 샹들리에와 마릴린 니쿠드 288 특정 개인에 관한 특정 요청의 경우, 일반적인 규칙에 자신을 국한시키는 것은 적절하지 않지만 필요한 것은 숙련된 실무자가 분석을 수행해야 합니다. 관련 환자의. 이 경우 어머니의 안색에 대한 언급과 아이의 중요성이 크다. 실제로, 의학 이론에 따르면 그때 태아는 어머니로부터 그 일을 받았고, 아버지로부터 형태를 받았다. 따라서 어느 정도 양쪽 부모의 성격을 물려받습니다. 덜 표시됨 185 . 자, 이 문자들은 마지막 분석에서 정의되었습니다. 용해, 부모의 안색에 의해, 말하자면, 각 개인의 기질을 형성하는 기본 자질 186 . 그러므로 안색의 현재 경우에 개입하는 것은 결코 바람직하지 않다 놀라운 점: 후자는 외부 신호에 의해 결정될 수 있습니다 경험 많은 의사가 인식하는 방법을 알고 있다는 것(외관 특성, 성격, 건강 등), 사용할 수 있습니다. 한 개인이 실제로 다른 사람의 후손임을 증명하기 위해서입니다. 1 이러한 유형의 야망은 동시대 논문에서 발견되었습니다. 특히 독자를 돕기 위해 고안된 physiognomy입니다. 세대와 그 자손의 통제, 연구를 통해 부모의 특성 187 . 여기서 젠틸레 다 폴리뇨는 다음을 가리킨다 안색에 대한 개별 분석은 의사이지만 결정할 수 없는 사람 in abstracto. 어떤 면에서 법의학의 비전은 다음과 같습니다. Gentile da Foligno의 논문은 한 가지 관점에서 상당히 제한적입니다 이론적 관점, 실용적인 관점에서 광범위합니다. 과학 그의 견해에 따르면, 에 대한 일반적인 틀을 제공할 수 있습니다. 어떤 경우에는 (이 경우 5개월째에 생존 가능한 출산 예를 들어, 임신) 그러나 다른 모든 경우에는 과학자의 실제적인 체험에 의지할 수 있지만, 과학자는 과학자가 아니다 무엇에 대한 일반적이고 과학적인 규칙 185 중세의 생성 이론에 대한 개요와 유전, 우리는 M. Van der Lugt를 참조합니다. 벌레, 악마, 처녀. 이 비범한 세대의 중세 이론, 파리, 2004 및 볼륨에서 M. Van der Lugt 및 C. de Miramon, 중세와 중세 사이의 유전 현대의. 역사적 관점, 피렌체, 2008 (마이크로로거스의 도서관, 27). 186 중세의 안색 이론에 관해서는 J. Chandelier와 A. Robert를 참조하십시오. 20세기 후반 이탈리아 의사의 인간 본성과 신체의 안색 중세, 안으로 합성 검토, 134-4, 2013, p. 473-510. 187 다니엘 자콰르트(Danielle Jacquart)에 따르면, 특히 Liber phisionomie 마이클 스코투스 (Michael Scotus)는 황제의 재혼의 맥락에서 1230 년경에 썼다. 프리드리히 2세. D. Jacquart 참조, 프리드리히 2세 시대의 생리학: 마이클 스코투스의 논문안으로 마이크로로거스, 2, 1994년, 19-37면. 사이의 관계 physiognomy and herdity, J. Ziegler, 참조 유전과 생리학, M. Van der Lugt와 C. de Miramon에서, 중세와 중세 사이의 유전 현대의... 인용. 245-271쪽, 특히 251-256쪽.