La Grande table culture
par Olivia Gesbert
Le 11/02/2021
Avoir 20 ans et faire de sa vie un roman
Dans le cadre de la journée spéciale "Avoir 20 ans en 2021", dialogue avec la jeune écrivaine Shane Haddad, pour son premier roman publié à 24 ans chez P.O.L., "Toni tout court". Histoire d'une journée d'anniversaire où la jeune fille devient jeune femme, roman d'apprentissage contemporain.
Shane Haddad a écrit Toni tout court (POL, janvier 2021) dans le cadre de son master de Création littéraire du Havre. Ce projet d'écriture, à l'origine sur le foot et le stade Bauer de Saint-Ouen, s'est transformé en narration d'une journée d'anniversaire : celle des 20 ans de Toni, la narratrice.
Je voulais comprendre à quel moment on devient responsable de son propre corps, à quel moment on n'est plus dans les chaînes d'une adolescence qui est extrêmement catégorisée. (Shane Haddad)
Les 20 ans, c'est marcher sans forcément comprendre où l'on va, mais comprendre que l'on va quelque part. (...) Une insouciance est passée, une légèreté est passée. (Shane Haddad)
J'ai l'impression qu'avoir 20 ans est un état qui dure. (...) A quelle époque ce serait simple de passer d'un corps d'enfant à un corps d'adulte ? Il n'y a aucune simplicité à savoir où l'on doit aller. (Shane Haddad)
Le livre raconte une errance urbaine faite de micro-événements : Toni se lève dans son studio, s’habille, va en cours en ratant son bus, suit des cours de littérature à la fac, se rend au restaurant à midi où son père manque leur rendez-vous, passe par un cinéma, puis par un festival de théâtre… Jusqu’à prendre le métro pour arriver au stade. Comme si toute cette journée d'anniversaire était tendue vers ce moment de la rencontre sportive du match, seul moyen de fêter cet anniversaire, seul rite communautaire possible.
Le livre permet de prendre le temps, de plonger dans une intimité, contrairement à l'éphémère des réseaux. (Shane Haddad)
Un texte travaillé au microscope par la jeune autrice : temps suspendu par la superposition de temporalités, polyphonie intérieure à la voix de Toni, extrême attention portée à toutes les sensations... On retrouve aussi les préoccupations de cette générations, des diktats imposées au corps de la femme bercée dans la culpabilité à l'anonymat imposé par les grandes villes.
Le combat des jeunes femmes, c'est de cesser d'être le miroir des projections autres. On doit désapprendre tout ce qu'on a appris. (Shane Haddad)
Je trouvais intéressant que dans l'écriture on donne quelque chose d'à la fois féminin et de masculin. (Shane Haddad)
A noter que le festival « Effractions » se tiendra en ligne sur le site de la Bpi : il est dédié aux littératures du réel et Shane Haddad y participe le dimanche 28 février à 14h dans le cadre d'une rencontre dédiée aux primo-romanciers, avec Frédéric Forte et Fatima Daas.
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La Grande table idées
Avoir 20 ans et philosopher !
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