La revue de presse
jeudi 17 février 2022
par Claude Askolovitch
Un homme roué de coup parce qu'il était nu dans un vestiaire de salle de sport, Midi Libre
5 minutes
Le point rencontre deux octogénaires heureux dans une cité de la drogue. Le Figaro raconte une unité israélienne composée de jeunes intégristes, responsable de la mort d'un retraité palestinien. Le Monde et Libération disent que Vincent Bolloré ment bien et étudie la généalogie de ses adversaires.
On parle d'une salle de sport...
Le Basic fit à Montpellier où un soir après la douche un homme, légionnaire, roumain et balèze éponge avec sa serviette ses parties intimes quand trois jeunes gens lui disent que ça ne se fait pas d'être tout nu dans un vestiaire, le lui ont-ils dit gentiment comme ils le prétendent au tribunal, ou de manière insultante (*)... Mais d'injures en provocations, quand l'homme remettait ses chaussettes, les trois autres lui sont tombés dessus et ont conclu le lynchage de deux coups d'extincteurs sur le crâne, et dans le compte-rendu du procès que fait Midi libre, on apprend qu'un avocat de la défense a expliqué que cette bagarre n'était pas gratuite, puisqu'elle opposait trois maghrébins à un légionnaire des pays de l'Est...
A Mimizan dans les Landes mardi dernier, là je suis dans Sud-Ouest, c'est au nom de l'identité sudiste qu'une bande menée par un crane rasé, sous alcool et cannabis a demandé à deux jeunes gens qui arrivaient du Nord, si l'on disait pain au chocolat ou chocolatine, ils ont répondu "pain au chocolat" et ont payé fracture et mâchoire et enfoncement du crane... Faut-il donner du sens à l'imbécilité d'un récidiviste des substances et de la baston...
Et voilà un fardeau de peur qui pèse sur nos âmes, et la violence et l'insécurité s'invitent aux Unes de Presse Océan du Progrès de Midi Libre et sur la couverture du Point: le sujet serait incontournable dans la campagne présidentielle, les reportages sont durs et en même temps nuancés. Je lis dans le Progrès qu'une quinquagénaire de la métropole de Lyon, filme les trafiquants de sa cité, et renseigne la police pour que cela s'arrête, mais je rencontre aussi dans le Point qui est allé à Brest, Marie -Madeleine et Jean 88 et 85 ans qui un jour ont vu tomber sur leur balcon un sac de sport contenant trois kilos de cannabis -c'était une erreur d'expédition dans leur quartier de Pontanézen où le trafic prospère mais enfin ça a toujours été le cas; et en dépit d'un cambriolage et de leur voiture esquintée cinq fois, nos retraités trouvent le quartier agréable, "il ne faut pas noircir le tableau...."
Dans le Figaro j'apprends que la vidéo surveillance coute à paris un demi milliard par ans, mais elle néglige les grands arrondissement où la violence menace les personnes, pour protéger les chics boutiques du centre, des Champs Elysées. A Estrebeuf dans la Somme, on compte dit encore le Figaro 13 caméras pour 250 habitants, soit une pour 20 habitants, mais c'est parce que la commune est très étendue, et puis l'été il y a les touristes le campings! Dans la Dépêche je lis les patrouilles des référents sureté de la police nationale, ils reniflent les quartiers qui peuvent basculer en insécurité, ils repèrent les espaces verts vides, le vide attire le mal, ils rassurent les mères de familles et guident les commerçants, c'est très humain, on le aime bien...
Et on parle d'une autre violence...
Et le Figaro encore nous raconte un septuagénaire Omar Assad, qui revenait de jouer aux cartes avec des amis quand son destin a basculé en croisant une patrouille, il a été malmené, et puis abandonné à même le sol, et est mort d'une crise cardiaque... Cela se passe en Palestine, en Cisjordanie, la patrouille appartenait à une unité de l'armée israélienne désormais sur la sellette, elle s'appelle Netzah Yehuda, elle a été créée pour accueillir des jeunes ultra-orthodoxes qui s'éloignent de l'étude biblique pour prendre les armes et retrouvent dans le bataillon d'autres religieux, ceux-là ultra-nationalistes, messianistes... Et ces jeunes gens en rupture de repères tournent violents et racistes, comme tous le perdus indentitaristes intégristes que nous connaissons. Omar Assad avait vécu 40 ans aux Etats-Unis avant de revenir au pays, c'est aussi parce qu'il était américain que sa mort a fait un tollé... Que croyez-vous.
En France on nous raconte des tribulations de milliardaires bretons.
Mediapart s'en prend au géant du luxe Kering, apanage de la famille Pinault, qui aurait subi un redressement d'au moins 210 millions d'euros pour solder ses affaires d'évasion fiscale, mais en fait aurait bénéficié d'un traitement de faveur...
Les Echos, Libération, le Monde, le Figaro, le site de Ouest France accompagnent la fête que donne aujourd'hui Vincent Bolloré à Ergué-Gabéric (Finistère), où en 1822 sa famille se lança dans l'industrie papetière... Il y aura une messe dans la chapelle de Kerdévot, un repas au manoir, l'achèvement peut-être d'une passation de pouvoir à son fils Cyrille dont les Echos troussent un portrait lisse, en est-il le reflet? On retrouve dans nos journaux les trois angles des portraits de Vincent Bolloré. Celui du folklore intime de la foi catholique bretonne et des doutes, l'angle du bâtisseur d'empire, et puis l'inquiétude qu'il inspire; le figaro raconte ce matin l'angoisse des auteurs face à la fusion Editis-Hachette que le vieux milliardaire va mener à bien personnellement -car on comprend aussi qu'il ne partira pas vraiment... Libération et le Monde, citant un bon livre sur le Bolloré, "l'homme qui inquiète" de Vincent Beaufils, m'apprennent qu'il est entre autres qualités un excellent menteur, et qu'il a appris de son mentor le banquier Antoine Bernheim, à prendre d'assaut les entreprises en étudiant la généalogie, les failles familiales de ceux qu'il veut déposséder... Mais qui regarde aujourd'hui l'arbre généalogique des Bolloré?
Et on parle enfin de colère...
Dans Libération, c'est de la philo, où l'on apprend que ce sentiment honni par le christianisme, avait de la valeur dans les tragédies grecques, et pourrait être utile à la vie de la cité, tant elle est une ressource de vitalité...
Dans l'Humanité, une chouette écrivaine Julia Deck qui jubilatoire brosse nos comédies, dans son dernier ouvrage "Monument national", elle raconte les 70 ans cloitrés d'un grand acteur encerclé par les gilets jaunes - Julia deck donc dit qu'elle transforme sa colère en ironie... Il en faut.
Dans le Monde sublime nous attend Jean-Jacques Schul, écrivain lui aussi, mais à son rythme, prix Goncourt 2000 pour son roman consacré à sa compagne la chanteuse et actrice Ingrid Caven, et qui revient avec "les Apparitions", son 6e livre en cinquante ans, il écrit à la main, il faxe a Gallimard, il contemple la vie dans le 7e arrondissement de Paris où de sa baie vitrée il voit le parc de l'a résidence de 'l'ambassadeur russe, il dit que la vie n'est pas réserve à ceux qui s'agitent, il dinait en mai 68 avec Godard en pleine révolution mais lui trouvait que les bottes des gendarmes mobiles ressemblaient aux booots des londoniens dans le vent. Il est classique et fétichiste sublime, éternel.
Dans le Parisien qui supplie; "Reste!", ne nous quitte pas, je lis que les buts de Mbappé sont tels les tableaux de Monet à l'orangerie. C'est impressionniste, pourtant vrai.
(*) A l'antenne, reprenant Midi Libre, j'ai cité des propos crus échangés par les protagonistes de l'affrontement au club de sport de Montpellier. Ces citations me paraissaient utiles pour comprendre une situation, mais des auditeurs ont pu en être choqués. J'en suis, évidemment, désolé, et m'en excuse. CA.