La revue de presse
Mardi 24 octobre 2023
Dans Libération se racontent deux amoureux dont on a tué un fils dans une rixe de quartier.
Dans Street press des jeunes migrants accusent des policiers de les vieillir sur leurs procès-verbaux afin de les rendre expulsables. Ouest-France raconte un "paligloo", une cabane de bric et de broc, qu'un retraité a construite pour un SDF. Paris-Normandie dit la joie d'un navigateur mal-voyant.
Vous nous parlez de deux amoureux...
Qui se sont rencontrés comme dans les comédies américaines, en se disputant...
«J'avais 20 ans et toi deux ans de moins. Il faisait beau, c'était à Châtelet. Tu étais assise sur la fontaine avec ta copine et mon chien m'a traîné vers toi.
— N'importe quoi. J'ai sifflé ton chien et il est arrivé vers moi, tout gentil. Toi, tu es arrivé comme un loubard.
— Je ne crois pas, non…
— Si. Je m'en souviens très bien. Tu m'as mal parlé parce que je l'ai appelé et après on a passé l'après-midi ensemble.
— Oui. Depuis, nous sommes toujours ensemble, ça fait déjà vingt-huit ans.»
Et il faudrait que la vie ne soit que cela, un garçon de banlieue hérissé de colère, parti de chez lui à 16 ans à force de dispute avec le père, devenu SDF, squattant chez des potes en attendant de faire l'armée chez les paras, rencontre une fille au père taiseux, un portugais dans le bâtiment, et la fille qui a du boulot, l'attend et l'accompagne dans la galère et puis ils prennent pied, du boulot, et trois garçons leur viennent...
Et puis.
C'est pour la plus mauvaise des raisons que je raconte l’amour que Houari et Cécile ont confié à Rachid Laireche de Libération, dans le bureau de leur avocate dans les beaux quartiers de Paris… Car dimanche 10 septembre à Sevran, leur deuxième enfant Adlen qui n'avait jamais fait de mal à personne est mort âgé de 18 ans tué par un autre jeune, armé, victimle d'une de ces guerres de quartier qu'une nouvelle fois Libé veut nous faire comprendre -le journal fait dialoguer un sociologue Marwan Mohamed et un jhournaliste, Olivier Bertrand, sur les rixes, les embrouilles, choisissez votre mot, les rixes les embrouilles qui ont volé le fils de deux amoureux...
Street Press, journal en ligne, m'emmène dans d'autres cabinets d'avocat, où l'on défend des jeunes migrants menacés d'expulsion, et qui accusent des policiers d'avoir falsifié leur âge dans des procès-verbaux, ils ressortent vieillis de 2 ans de 6 ans, suffisamment pour ne plus être considérés comme des mineurs, et leurs OQTF leur collent à la peau. Mais parfois, les jeunes gens gagnent.
Dans le le Monde je lis des jeunes gens israéliens, qui disent la déchirure d'une génération frappée par le Hamas, et je lis aussi des jeunes gens palestiniens de Gaza qui racontent leur vie en attendant les bombes « Je suis allongé dans mon lit, j'ai perdu toute mon énergie. Je ne sais pas si ma fatigue vient de la guerre, des bombardements, ou du fait que nous manquons des choses les plus essentielles"... J'apprends l'existence d'un collectif, We Are Not Numbers (« nous ne sommes pas des numéros ») – qui raconte sur internet en anglais les voix de Gaza souvent endeuillées...
Dans Libération encore et dans l'Humanité je lis un comédien, en tournée en France, Ahmed Tobasi, dont le spectacle, Here I am, raconte la jeunesse de Palestine, son énergie burlesque qui peut tourner aux attentats, au martyre. Quand il était môme furieux dans le camp de Jénine, Ahmed avait rencontré un arabe israelien engagé près des palestiniens, qui lui avait dit ceci: "Le théatre est une arme sérieuse". Cet homme, Juliano Mer Khamis est mort assassiné, Tobasi poursuit son théatre de la liberté
Dans le Figaro je lis des gens qui ne sont plus jeunes, et qui tels des palestiniens chassés de chez eux , conservent la clé d'une maison démolie, mais ceux là sont israeliens, d'anciens colons du Goush Katif, ces implantations qu'Israel avait érigée à gaza... Ils rêvent de revenir, après le chaos. Est ce une comédie...
On parle encore d'une maison...
Au joli nom, un « paligloo », c'est (Ouest-france me l’apprend) une cahute fabriquée avec des matériaux de récupérations, des dômes de bric et de broc qu'adore construire denis, 69 ans, ci-devant balayeur devenu chef d'équipe dans le bâtiment et désormais retraité bâtisseur de bicoques pour des associations, des maraichers bios, et aussi pour Bruno, lui ci-devant taulard et sdf de 55 ans, désormais installé dans un six étoiles dit-il de sa voix éraillée, à Allones, au sud du Mans… 25 m2, les fondations sont faites de pneus remplis de bouteilles de verre et de bouchons en plastique. L'armature est un assemblage de bois de palette, sur lequel a été fixé du grillage fin. Les murs : un mélange de paille et de terre finition à la chaux et au sable blanc…
Bruno et Denis se sont rencontrés pendant les manifs contre la réforme des retraites… Denis bataillait contre une bâche récalcitrante, au milieu du village associatif monté dans le centre-ville du Mans. Bruno passait par là. Il a filé un coup de main au militant… Ce fut le début d'une belle amitié comme on dit dans les vieux films… Bruno aide désormais Denis a retaper ses paligloos. Ça purgera sa peine de 70 heurtes d'intérêt général, sa maman vient le voir, elle lui fait son linge elle voit qu'il est heureux.
Et cette amitié m'en amène d'autres.
Je lis dans Paris-Normandie un navigateur heureux qui dimanche prendra le départ de la transat Jacques Vabre, il s'appelle Joel Paris, il est « miro » dit-il et c'est une litote, né avec zéro à l'œil droit et 2 dixièmes à gauche, cataracte congénitale et glaucome. Mais le bateau, il sent, tout, jusqu'à la fesse, dit-il et son partenaire Jérôme Ragimbeau dit qu'il a une perception plus forte que la sienne...
Dans Libération toujours, beau numéro ce matin, je lis l'amitié qui a saisi deux artistes, Bettina Grossman qui était une nonagénaire inconnue dont les oeuvres s'entassaient dans sa chambre de l'hôtel Chelsea à New York, et Yto Barrada, elle franco-marocaine citoyenne du monde qui découvrant Grossman l'imposa dans ses propres exposition, et encore aujourd'hui à Paris; Grossman est morte, Barrada racheté toutes ses oeuvres, elle crée un bric à brac splendide, elle dit que l'art est touit, je plante, je teste, je dissémine...
Et on parle enfin d'une vocation.
Et des hasards qui révèlent nos existences, et on fait provision de bonheur dans la Montagne avec Chloé immense sourire et bras de conquérante, qui était paisible vétérinaire en ville et qu'un ancien patron de stage a appelé à la vraie vie, véto rurale dans la Creuse, et la force est contagieuse... Dans le Maine Libre voilà Christiane au moins aussi solide se prépare à rouvrir le café de la Place à Préval fermé depuis un an, elle fut mécanicienne, elle a entendu parler du lieu a une fête du cochon grillé, pas de meilleurs auspices, elle a 58 ans elle dit qu'elle doit etre folle, mais non tu es sage...
Sage autant que Laurie Robert, 28 ans, bras croisés, la même solidité à la une de l'Est républicain, qui elle rouvre la boucherie Montéchéroux, qui avait fermé l'année de sa naissance....
Dans le même Est républicain, je lis un curé, François Vuillemain, qui il y a vingt ans avait perdu son appareil photo dans une ballade dans les Hautes-Pyrénées. Une promeneuse l'a retrouvé en aout dernier, dans un éboulis, et a lancé un appel à reconnaissance sur Facebook. Elle dit ceci: « La pochette était en bon état. Il y avait un appareil photo, je me suis dit que ca ne devait pas être récent parce qu'actuellement, nous avons nos téléphones pour les photos." On vieillit.