La revue de presse
Mercredi 26 juin 2024
Le Monde explore nos connections neuronales à la recherche du nous-même oublié d'avant nos trois ans
Observant des adolescentes voilées, Philiippe Lançon dans Charlie hebdo cherche sa jeunesse. La cinéaste Alice Diop dit sa peur de ce qui vient à Libération . Paris-Normandie raconte une tour si charismatique qu'elle fait de l'ombre au béton de Perret et le Havre pourrait perdre son label Unesco!
Vous nous parlez de Paul Auster…
Qui nous quitté fin avril et dont me sont revenues des phrases d’un livre consacré à son père, « L’invention de la solitude », des phrases qui parlaient de l’oubli…
« C’est un monde perdu pour toujours. Le petit garçon oubliera tout ce qui lui est arrivé jusqu'ici. Il n'en restera rien qu'une vague lueur, peut-être moins encore. Les milliers d'heures que A. lui a consacrées pendant les trois premières années de sa vie, les millions de mots qu'il lui a dits, les livres qu'il lui a lus, les repas qu'il lui a préparés, les larmes qu'il a essuyées – tout cela disparaîtra à jamais de la mémoire de l'enfant. »
Et j’ai pensé à Paul Auster en lisant dans le Monde en kiosque depuis hier et sur le web aussi une enquête fascinante sur l’amnésie infantile, qui efface en nous en apparence ce que nous fûmes avant nos trois ans, et rend obscures nos expériences d’avant nos six ans…
Et le Monde,qui lui se place sous le patronage de Patrick Modiano perplexe devant une photo de lui-même enfant, nous emmène dans les neurosciences explorer nos synapses nos connections nos engrammes, qui sont la trace dans le cerveau de nos souvenirs, nos microglies, qui suppriment l’excès de connections, la surcharge des cerveaux… Il nous emmène Le Monde à Berlin à l’Institut Max-Planck pou dans un décor ludique, on teste des bambins qui marchent à peine sans vaciller à trouver un doudou, une peluche jaune cachée dans une boite, comment Anna jolie blondinette de 21 mois va-t-elle mémoriser le parcours, que lui en restera t il demain, et dans 6 mois…
Et l’on m’explique ce paradoxe… L’enfant, le petit enfant, apprend à une vitesse effrénée, c’est un apprenant prodigieux le langage le déplacement les savoirs i les apprend et les grave en lui, il ne les perdra pas, mais les circonstances de son existence, les souvenirs personnels s’en vont - question de stockage, car ceux là sont logés dans une partier du cerveau, l’hippocampe, qui ne sera mature que vers six ans, et qui avant ne sait pas sécuriser ce qu’elle reçoit dans des connexions neuronales… Le cerveau est bien fait pour l’espèce. Il est au commencement de nos vies « orienté vers la généralisation, l’extraction des règles du monde », et ensuite seulement il s’occupe des détails que nous chérissons…
Mais en même temps, ces détails lis-je pourraient dormir en nous, dans des engrammes silencieux… Et la science trouve le vieux Freud, qui avait théorisé l’amnésie infantile, expliquant que nous refoulions nos primes souvenirs mais ceux ci nous parlaient sans le dire…
Dans Charlie Hebdo, un désormais sexagénaire que je connus jeune homme, nous avons le même âge, le journaliste écrivain Philippe Lançon, se raconte dans un square, dur d’oreille, essayant de capter les bavardages d’adolescentes « joyeuses, farceuses, gazouillantes », écrit Lançon. « Elles sont françaises, arabes, couvertes : je ne vois que l’arrondi de leurs visages »… Et de ces adolescentes voilées « aux allures de vierge Marie », qu’il a du mal à comprendre, elles parlent trop vite et son ouïe est ralentie, ces adolescentes dont le voile pense -t -il dit qu’elles ne sont pas du même monde que lui, Lançon part vers sa jeunesse quand tout se mélangeait d’apparence car en vérité dans ses lycées, ses collèges où l’on était de gauche spontanément: « Les enfants noirs et arabes, ceux de la première génération nés en France, étaient presque absents. Pourtant, ils étaient bien là. Mais où étaient-ils ? Au lycée professionnel, dans des « classes de transition ». Je ne sais où. Je n’y pensais pas. »
Et Le vieux Monsieur frôle la tangente de ses nostalgies de ses inconnues, de ses préjugés sincères, il ne sait pas, il rend superbement le désarroi que nous connaissons.
Et on parle d’un autre souvenir…
D’une femme de 45 ans qui dans libération se rappelle la fillette de 8 ans qu’elle était à qui son père -ils venaient du Sénégal, remettait sa première carte d’identité, dans un moment solennel, « il nous a convoqué dans le salon mes frères, mes sœurs et moi. Il nous a dit : «Voilà, vous êtes français. Maintenant, il faut voter Mitterrand !» » Et quand Mitterrand avait été réélu la cité d’Aulnay-sous-bois avait sorti les casseroles pour fêter ça en musique, en 1988…
Et elle se souvient donc de ses bonheurs français au moment où la peur le malaise la saisit, Alice Diop, cinéaste deux fois primée à la Mostra de Venise il y a deux ans pour son film « Saint-Omer », qui a le sentiment que la République la trahit ces jours, ci, elle voudrait que l’on parle de racisme, qu’on n’évite pas le mot. La politique a envahi son corps, elle a fait un malaise la veille des européennes, et ensuite était « gelée à l’intérieur » d’elle-même… Elle a voulu le dire à Libération, qu’elle se sent de ceux qui seront « les premières cibles »: « Pour les gens comme moi c’est la vie ou la mort. » Cest de la politique, c’est du ressenti, c’est une voix…
L’Opinion nous dit qu’en haut lieu on redoute la violence qui viendra entre « antifas » et groupes d’extrême droite, si le RN emporte les législatives, est ce une parole performative, dont le prononcé est sa réalisation, est-ce une réalité ou de la politique, cela se lit.…
Sur le site de la Montagne, vous lirez la splendide histoire des portugais d’Auvergne, de Clermont-Ferrand, de Volvic, de Michelin, qui fuyaient la misère au siècle dernier, alimentaient les usines, se débrouillaient, faisaient revivre le village en déclin de La Roche-Blanche, près du plateau de Gergovie, étaient illégaux clandestins souvent pourtant, puis un jour la République décida qu’ils ne le seraient plus…
Le Maine libre, qui fait sa une sur l’immigration, enjeu de la campagne, nous emmène à Sablé sur Sarthe et alentours où il y a quarante ans « il n’y avait pas un étranger, maintenant on ne voit qu’eux », dit une dame qui ajoute pourtant.:« Mais c’est vrai que ma mère n’a jamais eu de problème, elle ne ferme même pas sa porte à clé ». Et on marche à petit pas précautionneux dans le possible vivre ensemble, et l’on écoute Dany à Solesmes, 15 ans, maman martiniquaise et père marocain qui prend soin de ne pas bousculer une personne âgée sans le faire exprès, car « même si je m’excuse, elle va s’emporter et me dire : retourne dans ton pays »… Il ne fait plus attention…
Et on parle enfin d’une tour…
Dont la forme vrillée et les 17 étages, 55 mètres de haut, sont une attraction au Havre un grand projet d’Edouard Philippe, une beauté de béton érigée selon les principes des ouvrages d’art, inaugurée en décembre…
Mais… On la voit tellement la tour de tous les coins du Havre qu’à l’Unesco, on trouve qu’on la voit trop et qu’elle fait de l’ombre au centre-ville conçu par le grand architecte Auguste Perret, dont le béton avait relevé le Havre après la guerre, et qui vaut à ce centre-ville une inscription au patrimoine mondial de l’humanité… Inscription que le Havre pourrait perdre à cause de la Tour Alta révèle Paris-Normandie, qui a lu les conclusions d’une mission diligentée par l’Unesco en juin de l’an dernier, quand la Tour était encore en chantier…
Citation.
« La tour Alta a un impact important sur les éléments les plus significatifs de la valeur universelle exceptionnelle du (centre ville). elle perturbe plusieurs perspectives emblématiques de la ville (…) La centralité urbaine, élément essentiel de l’ensemble architectural d’Auguste Perret, pourrait également être compromise »
Bref, au-delà du jargon, l’Unesco demandait que l’édifice ne soit pas illuminé la nuit (ce n’est pas envisagé, on passe) mais aussi que sa couleur gris anthracite trop contrastante soit remplacée par une teinte plus claire, passe-partout…
Et là on coince, la tour a conservé son gris et les architectes d’Alta, Hamonic et Masson, y tiennent…
L’UNESCO a envoyé de nouveaux experts ce printemps… On saura leurs conclusions ce mois-ci, et si le Havre sera reclassé « bien en péril » du patrimoine mondial, avant d’être expulsé de ce patrimoine…
Dans Sud Ouest je lis qu’on a rénovée à Espelette la tombe d’une jeune femme si belle, morte si jeune d’une péritonite âgée de 26 ans, en 1928, cette année-là naissait mon père. Elle s’appelait Agnès Souret et avait été la première miss France, élue « plus belle femme » du pays à l’âge de 18 ans, elle avait voulue être comédienne ensuite, elle fut danseuse de cabaret -sa vie est sur le site de Sud-Ouest, on espère à Espelette que sa mémoire nourrira le tourisme.