Journal de 12h30
Vendredi 11 novembre 2022
La fin d'un calvaire
Le navire "Ocean Viking" de l'organisation maritime-humanitaire européenne "SOS Méditerranée" arrive à Toulon ©AFP - CHRISTOPHE SIMON / AFP
Le navire humanitaire Ocean Viking et ses 230 rescapés à bord a accosté ce matin au port militaire de Toulon. Une première en France qui suscite non seulement des tensions avec l'Italie mais aussi des débats de politique intérieure sur l'immigration.
Jusqu’à la dernière minute, soit après trois longues semaines au cours desquelles les 234 migrants secourus au large de la Libye auront erré en Méditerranée à la recherche d’un port d’accueil, la France aura attendu que l’Italie les invite à débarquer chez elle. Et finalement face au refus catégorique de Rome, Paris a donc concédé prendre à sa charge la vie de ces âmes perdues qui, sans le secours du navire Ocean Viking auraient très certainement déjà rejoint le tombeau pour migrants que constitue aujourd’hui la mer Méditerranée. Une faveur "à titre exceptionnel" a toutefois tenu à préciser aussitôt le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. Et de fait depuis 2014, date à laquelle les premiers navires d'ONG ont commencé à patrouiller sur la voie migratoire la plus meurtrière au monde (plus de 25 000 morts en 8 ans), jamais la France n'avait encore accueilli le moindre de ces bateaux-ambulance.
Si les autorités françaises ne manquent pas de préciser depuis hier avoir agit par un "devoir d'humanité", elles ne pardonnent toujours pas en revanche à l'Italie d'avoir refusé d'ouvrir ses ports comme le prévoit le droit maritime. "Il y a une rupture de confiance" avec l'Italie, a encore répété ce matin la secrétaire d'État chargée de l'Europe Laurence Boone. Au point d'ailleurs qu'en guise de protestation pour avoir été contrainte, donc, d'accueillir 234 hommes, femmes et enfants, la France a décidé de suspendre "à effet immédiat" le transfert des 3.500 migrants actuellement présents en Italie et qu'elle s'était engagée à accueillir, conformément au mécanisme européen de relocalisation des demandeurs d'asile. Ce matin, d'ailleurs, la nouvelle Première ministre Giorgia Meloni a de nouveau dénoncé une réaction française "agressive et injustifiée".
Et puis à la crise diplomatique entre Rome et Paris est venue s'ajouter en France une crise intérieure puisque, comme en Italie, en métropole aussi les réfugiés sont un terrain de bataille politique. Comme attendu, l'extrême droite n'a pas tardé à dénoncer "un signal dramatique de laxisme" de la part d'Emmanuel Macron. Le chef de l'Etat obligé désormais de naviguer en eau trouble, lui qui tente d'un côté de combattre l’opposition du Rassemblement national, tout en maintenant de l'autre une position de fermeté pour des raisons de consensus.
L'invité de la rédaction : Antoine Pécoud, sociologue, chercheur au CERI et spécialiste de la gouvernance des migrations.
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Une étude de référence publiée ce matin est venue rappeler le niveau de l'urgence climatique. Ou quand on apprend que les émissions de CO2, produites par la consommation d'énergies fossiles et principales responsables du réchauffement s'apprêtent à dépasser cette année leur niveau record. Une hausse qui s'explique par la conjonction de deux facteurs : la poursuite de la reprise post-Covid d'une part et la crise énergétique d'autre part.
Et c'est dans ce contexte, donc, que Joe Biden ragaillardi par la résistance inespérée de son parti aux élections de mi-mandat, mais aussi la publication hier des bons chiffres de l’inflation américaine en recul par rapport au mois précédent fera une brève escale aujourd'hui à la COP27. Première étape d'une longue séquence internationale.
Enfin signe qu'en dépit des incertitudes climatiques, géopolitiques mais aussi économiques (la Commission européenne a encore prévenu ce matin que la zone euro devrait entrer en récession dès la fin de l'année), le marché de l'art continue, lui, de croître de manière insolente. Hier soir, la vente de la collection d'art de Paul Allen, le cofondateur de Microsoft s'est achevée chez Christie's, à New York, pour un record de 1,6 milliard de dollars.