COP28 : à Dubaï, présence massive des lobbyistes des énergies fossiles
D’après une coalition de 450 organisations, près de 2 500 lobbyistes des énergies fossiles ont été accrédités pour la conférence sur le climat qui se tient actuellement à Dubaï.
Le Monde avec AFP
Publié aujourd’hui à 11h13, modifié à 12h09
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Le président de la conférence, Sultan Al-Jaber, le 4 décembre 2023 à Dubaï. THAIER AL-SUDANI / REUTERS
Leur présence n’a jamais été aussi importante lors d’une conférence sur le climat (COP). Près de 2 500 lobbyistes des énergies fossiles ont obtenu une accréditation pour la COP28 organisée depuis le 30 novembre à Dubaï, a déploré mardi 5 décembre une coalition d’ONG, Kick Big Polluters Out, dans un communiqué.
Ce regroupement de 450 organisations – dont Global Witness, Greenpeace et Transparency International – s’est appuyé sur la liste provisoire des participants publiée par l’ONU qui est, selon eux, probablement sous-estimée, puisque son analyse se fonde uniquement sur des données publiques.
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Le décompte « ligne par ligne » des ONG ne prend pas en compte les lobbyistes d’autres secteurs polluants mais compte « tout individu qui peut raisonnablement avoir pour objectif d’influencer » la COP28 « dans l’intérêt des entreprises fossiles et de leurs actionnaires » comme le ferait un lobbyiste, précisent-ils dans leur texte. Pour la première fois, les participants devaient renseigner leur employeur et la relation, financière ou non, avec l’entité demandant une accréditation en leur nom. « Je n’ai aucune confiance dans le fait que la COP réussira [si] les Nations unies continuent de permettre à l’industrie des énergies fossiles » d’en mener les débats, a tancé auprès de l’Agence France-Presse Thomas Harmy Joseph, de l’ONG américaine Indigenous Environmental Network.
Seules les délégations du Brésil (plus de 3 000 personnes) et des Emirats arabes unis (près de 4 500 sans compter leurs 4 900 invités), où se déroule la COP28, sont plus importantes que les lobbyistes des énergies fossiles, qui surpassent en nombre les délégations des dix pays « les plus vulnérables au changement climatique » (1 509 personnes) et les représentants des populations indigènes (316), rapporte également Kick Big Polluters Out. De nombreux pays ont ainsi intégré dans leur délégation des représentants des compagnies pétrolières ou gazières nationales : la France a accrédité le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, l’Italie a permis la venue des cadres d’ENI et l’Union européenne, celle des employés de BP, ENI et ExxonMobil, selon la coalition d’ONG.
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Critiques contre le président de la COP28
Depuis le début de cette COP28, l’ombre des lobbyistes des énergies fossiles ne cesse de planer alors que la sortie progressive de l’usage du charbon, du pétrole et du gaz est au cœur des négociations pour lutter contre le réchauffement climatique.
Le président de la conférence, Sultan Al-Jaber, qui dirige aussi la compagnie pétrolière nationale, a d’ailleurs subi de nombreuses critiques ces derniers jours après la publication, lundi, d’une vidéo par le quotidien britannique The Guardian. Les images montrent un échange, le 21 novembre, entre l’ancienne présidente irlandaise Mary Robinson, membre du groupe Global Elders, et M. Al-Jaber, qui remet en doute la nécessité de sortir des énergies fossiles pour limiter le réchauffement climat à 1,5 °C – soit l’objectif le plus ambitieux pris lors de l’accord de Paris en 2015.
« Je ne souscrirai en aucun cas à des discussions alarmistes, affirme, au cours de cette discussion, M. Al-Jaber. Aucune étude scientifique, aucun scénario, ne dit que la sortie des énergies fossiles nous permettra d’atteindre 1,5 °C. (…) Montrez-moi la feuille de route d’une sortie des énergies fossiles qui soit compatible avec le développement socio-économique, sans renvoyer le monde à l’âge des cavernes. »
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Alors que les négociations entre les 198 délégations se poursuivent, la deuxième version du texte qui servira de base de discussion en vue d’une adoption à la fin de la COP, prévue officiellement le 12 décembre, a été rendue publique mardi matin. Si toutes les options sont encore sur la table, celles visant à une « une réduction » ou « une sortie ordonnée » du charbon, du pétrole et du gaz figurent encore dans le texte, ce qui serait une première dans l’histoire des conférences mondiales sur le climat. « J’ai dit et redit que la réduction et la sortie des énergies fossiles étaient inévitables », a ainsi fait valoir lundi M. Al-Jaber, au cours d’une conférence de presse.